Sciences

Y a-t-il quelqu'un?

01/07/2012 | par Avi Shafran

La preuve a été faite que des patients considérés dans un état végétatif peuvent entendre et penser.

Les gravats ne bougent pas, tout semble très calme. Mais un léger tapotement émerge de quelque part en-dessous. Vous criez "Vous m’entendez?" Et les tapotements augmentent de plus belle.

Il vous vient alors une idée. "Si vous pouvez me comprendre", criez-vous, "tapez une fois." Un seul coup. "Si vous êtes blessé," dites-vous ensuite, "tapez deux fois." Deux coups. Il y a définitivement bien quelqu'un là-dessous !

Cette scène évoque les suites d'une catastrophe naturelle comme le tremblement de terre de Janvier en Haïti ou ce qui se passe aujourd'hui au Chili. Mais elle pourrait également être une métaphore convaincante pour la découverte d'un être humain qui a du mal à se faire entendre sous les décombres d'un corps qui est tout simplement trop difficile à mouvoir.

Un groupe de scientifiques européens a découvert un moyen high-tech d’effectivement entendre le tapotement d'un esprit emprisonné dans un corps qui ne répond pas. Il a été prouvé que quatre patients diagnostiqués comme végétatifs et supposé être inconscients étaient bien conscients, en dépit de leur incapacité à se déplacer ou à signaler leur état de conscience par un quelconque mouvement, pas même un clignement d’œil.

Cette découverte est le résultat de l'utilisation créative de quelque chose appelé résonance magnétique fonctionnelle (IRMf), qui montre l'activité cellulaire de toutes les régions du cerveau. Qu'a-t-elle démontré ? Que les patients entendent et pensent. Et qu'ils peuvent communiquer.

Les chercheurs ont utilisé le fait que lorsqu’une personne pense à un mouvement actif, les cellules d’une certaine zone du cerveau deviennent actives; et que lorsqu’elle visualise un déplacement en terrain familier, c’est une zone différente du cerveau qui montre une activité cellulaire.
Ces chercheurs ont donc demandé aux patients qui ne répondaient pas physiquement d’imaginer d’abord balancer une raquette de tennis et ensuite de s'imaginer se déplaçant à travers les chambres de leurs maisons respectives. L'analyse IRMf a montré une activité dans des domaines différents du cerveau à chacune de leurs pensées.

Cela est déjà très impressionnant en soi. Mais ensuite, les chercheurs ont posé à chaque patient, une série de questions auxquelles il fallait répondre par oui ou par non. Par exemple s’ils avaient un parent ou un frère portant un certain nom, et ils ont demandé aux patients de répondre «oui» en imaginant jouer au tennis et «non» en imaginant un déplacement à l’intérieur de leur domicile. Chaque patient a été chargé de se concentrer sur le «oui» ou sur le «non» en pensant aux activités pendant une période de 30 secondes, bien au-delà de la portée de n'importe quel artefact d’activité cérébrale aléatoire. Ils ont été en mesure de répondre avec précision.

Les résultats sont frappants. Les réponses fournies par les quatre patients, qui faisaient partie d'un groupe de 54 personnes testées, étaient toutes correctes, ce qui démontre que la conscience peut résider dans un corps apparemment séparé du monde. Avant l'IRMf, une telle assertion n’aurait pas eu plus de valeur qu'une déclaration de foi. Aujourd’hui, on en a la preuve, c’est un fait.
Il nous reste alors à spéculer pour savoir si une certaine technologie de l'avenir encore plus sensible pourra un jour révéler la conscience, même chez les patients dont le cerveau ne peut pas générer des signaux détectables par les méthodes actuelles.

Personne ne sait quel degré de conscience persiste dans un corps incapable de bouger. Mais maintenant nous savons que dans une certaine mesure, il peut persister une certaine conscience, chez des personnes dont on pensait auparavant qu’elles n’étaient pratiquement plus des êtres humains.

Certains ne sont toujours pas convaincus qu'ils sont, en effet, encore des êtres humains doués de la faculté de penser. Dans un éditorial du New England Journal of Medicine, le Dr Allan H. Ropper, neurologue, a mis en garde contre : selon les termes du New York Times : « l’assimilation de l'activité neuronale [comme celle observée dans les scans du cerveau des quatre patients] avec l'identité [humaine] ».
Il y affirme que« les médecins et la société ne sont pas prêts pour cela et que cela reviendrait à « mettre Descartes avant les bœufs que de dire : J’ai une trace d'activation de mon cerveau, donc je suis. » 
Un fin plaisantin que ce Dr Ropper, mais la question est en fait bien plus grave.

Que penserions-nous de quelqu'un qui regarde sous des décombres apparemment immobiles, entend de faibles sons ... et s’en va?

Dans un article paru en Grande-Bretagne, dans The Guardian, le professeur de droit et d'éthique Sheila McLean de l’Université de Glasgow ne traite pas "l'activation du cerveau», autant à la légère que le Dr Ropper. Au contraire, elle suppose que les patients comme ceux qui ont communiqué leurs réponses aux scientifiques européens étaient bien en train de penser. Néanmoins, elle demande : "Si la guérison du patient est vraiment impossible, est-ce vraiment de la compassion que de garder en vie des personnes vivant dans de telles conditions ?
"Franchement", affirme t-elle, «la seule chose pire que d'être dans un état végétatif doit être de l’être tout en en étant conscient."

Peut-être. Mais là encore, peut-être pas. Le Professeur Mc Lean va un peu trop vite à évaluer la valeur d’une vie même physiquement emprisonnée. Le mouvement est-il la seule chose qui signifie la vie?

Les hommes et les femmes se retrouvent souvent face à la question du sens de la vie. Nous ne connaîtrons pas tous des épiphanies à la fin de notre vie, mais nous avons tous le potentiel d'être béni. Et beaucoup d'entre nous, même s’ils sont immobiles, ne répondent pas physiquement et n’ont aucun espoir raisonnable de guérison, peuvent, peut-être encore, être engagés dans les questions les plus importantes - des choses comme le pardon, le repentir, l'acceptation, l'engagement, l'amour de Dieu - peut-être mêmes les questions les plus importantes que nous n'aurions jamais considérées comme telles au cours de notre vie.

Est-ce que ces rencontres vitales ont une valeur moindre que celle de courir et de sauter? Est-ce que mettre fin à une vie de pure contemplation est moins contestable que mettre fin à la vie de celui qui est capable d’activité physique?

Et, comme le note le professeur Mc Lean, "la conséquence d'un diagnostic d'état végétatif permanent, c'est qu'il devient alors légitime de retirer la nutrition et l'hydratation assistée" - qui résulte, bien sûr, dans la mort du patient.

On en revient aux suites de la catastrophe naturelle. Que penserions-nous de quelqu'un qui regarde sous des décombres apparemment immobiles, entend de faibles bruits... et juste s'éloigne?

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