Société

De la lettre d’Eichmann à la déclaration de Ban Ki-moon

02/02/2016 | par rabbin Benjamin Blech

Hier comme aujourd’hui, excuser le mal c’est le multiplier…

Deux nouvelles ont fait les gros titres la semaine dernière et selon moi, il existe un lien d’une ironie sinistre entre les deux.  

La première est une révélation concernant l’un des architectes principaux de la Shoah. Jamais dévoilée jusqu’à présent, elle ajoute un détail fascinant à l’exécution par Israël d’Adolf Eichmann pour ses crimes atroces contre l’humanité et le peuple juif. À la suite du procès qui l’avait condamné à mort pour son rôle majeur dans l’extermination de 6 millions de Juifs, nous apprenons maintenant que le criminel nazi adressa une lettre de demande de grâce au président israélien de l’époque, Yitzhak Ben-Zvi : « On doit distinguer les chefs responsables des personnes comme moi qui ont été forcées de servir comme de simples instruments entre leurs mains » écrivit Eichmann, se faisant écho de cette même justification invoquée par ses coïnculpés lors des procès de Nuremberg. Et d’ajouter : « Je n’étais pas un chef responsable, et je ne me sens ainsi pas coupable. »

Point de culpabilité, point de remords, point de repentir – parce qu’Eichmann fut capable de rationaliser les actes les plus barbares perpétrées par le régime nazi sous sa direction. Dans son esprit maléfique, une excuse suffisait pour s’auto-justifier ; une raison lui garantissait le pardon et l’absolution.

La lettre, écrite à la main par Eichmann en allemand, ainsi que d’autres documents originaux du procès, ont été rendus publics pour la première fois mercredi dernier par l’actuel président d’Israël, Réouven Rivlin, lors d’une cérémonie marquant la Journée internationale à la mémoire des victimes de la Shoah.

Son prédécesseur Yitzhak Ben-Zvi refusa cette demande de grâce. L’exécution d’Adolf Eichmann par pendaison, la seule et unique fois où Israël appliqua la peine capitale, était destinée à transmettre un message ferme et sans équivoque au monde entier et aux futures générations ; celui voulant que le mal absolu ne puisse avoir l’audace de chercher à se faire pardonner par des rationalisations et qu’aucune explication ne puisse jamais été considérée comme une cause de justification.

Dans une note manuscrite jointe par Ben-Zvi au télégramme rejetant l’appel d’Eichmann, le président écrivit une citation biblique : « Mais Samuel dit : “Comme ton épée a désolé les mères, qu'ainsi ta mère soit désolée entre les femmes !” » (Samuel I 15, 33)

La révélation de la lettre d’Eichmann, notamment parce qu’elle coïncide avec la Journée internationale à la mémoire des victimes de la Shoah, fut un rappel catégorique d’une vérité que le monde doit à tout prix reconnaître s’il espère éviter la répétition d’une tragédie qui obscurcit la mémoire du vingtième siècle : le mal absolu doit être condamné, sans réserve et sans explication.

Et puis, dans une ironie sans précédent qui remet d’ailleurs en cause la légitimité même des Nations Unies, le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a prouvé de manière flagrante que c’est précisément idée qu’il refuse d’accepter ou d’appréhender.

En réponse à la vague de terrorisme qui frappe actuellement Israël – un terrorisme d’une cruauté quasiment inimaginable – Ban Ki-moon a réagi à ces actes d’une violence inouïe en affirmant qu’ « il est dans la nature humaine de réagir à l’occupation ». Ainsi, pour le secrétaire général de l’ONU, le terrorisme palestinien a un motif. Il n’est rien de moins qu’une réaction aux « actes provocateurs » d’Israël. Et selon Ban Ki-moon, cette réaction n’est rien de moins qu’un apanage de la « nature humaine ».

Essayons d’assimiler la pleine signification de la calomnie du secrétaire général de l’ONU à l’encontre de notre nature humaine – d’origine divine. Selon le dictionnaire Webster’s, la notion de nature humaine renvoie aux « modes de pensée, de sentiment et d’action qui sont communs à la plupart des gens ».

Ce qui laisse entendre que les récentes manifestations de la frustration palestinienne seraient « communs à la plupart des gens ». Comme par exemple :

  • Poignarder une mère de famille devant trois de ses enfants.
  • Blesser grièvement un adolescent de 13 ans en le poignardant sur sa bicyclette.
  • Assassiner des juifs dont le seul crime autre que celui de leur identité fut de prier ensemble dans une synagogue.
  • Tirer à l’aveuglette sur des personnes attablées à la terrasse d’un café de Tel Aviv.

La liste est encore longue, rivalisant d’atroces détails macabres. C’est l’histoire d’une cruauté sans répit qui devrait choquer l’esprit civilisé de par sa perversion.

Mais c’est ce que le secrétaire général des Nations Unies, un organisme prétendument créé pour faire ressortir le meilleur de l’espèce humaine, croit sincèrement être la véritable définition de la nature humaine. Une définition qui peut ensuite expliquer la prévalence du mal comme n’étant rien autre qu’une expression de notre nature innée et inaltérable.

Mais si nous partageons la croyance biblique voulant que l’espèce humaine fût créée à l’image de Dieu, jamais nous ne nous permettrons de justifier le mal en invoquant la médiocrité de la condition humaine.

Car à sa source, la nature humaine est ancrée dans notre essence spirituelle. Notre âme aspire à faire le bien. Certes, le libre arbitre permet la possibilité du mal. Mais comme il est tragique de voir des gens corrompre leur essence spirituelle et ignorer leur véritable « nature humaine » allouée par Dieu.

La Shoah fut l’œuvre d’individus qui considéraient que leur mal pouvait être excusé, que leurs crimes pouvaient être pardonnés. Comme il est triste que 70 ans plus tard le porte-parole des nations du monde répète la même absurdité camouflée seulement par un verbiage quelque peu différent. Il serait tragique de ne pas réagir avec une indignation bien méritée face à cette déclaration suggérant que notre « nature humaine » puisse motiver des actes de meurtre et de violence d’une telle cruauté.

Parce qu’un monde qui accepte une allégation aussi obscène n’est plus qu’à deux doigts d’en faire une réalité.

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