Société

La France et l’avortement des fœtus atteints de trisomie 21

14/12/2016 | par Nechemia Coopersmith

Le dépistage génétique prénatal conduit à l’élimination de bébés qui auraient dû naître trisomiques. La France veut maintenir cet état de fait.

De manière générale, le dépistage génétique prénatal conduit à l’élimination de bébés qui auraient dû naître trisomiques. Dans près de 90 pourcent des cas où le syndrome de Down est découvert, le fœtus est avorté. Et si l’on se fie à la récente décision du Conseil d’État, il semble que la France soit bien décidée à maintenir cet état de fait.

L’affaire commence en mars 2014, à l’occasion de la journée mondiale de la trisomie, lorsque le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) stoppe la diffusion d’un spot télévisé intitulé « Chère future Maman » qui répond aux craintes et inquiétudes d’une mère découvrant qu’elle attend un bébé atteint de trisomie 21.

« J’ai peur : quel genre de vie mènera mon enfant ? » se demande la femme. Plusieurs jeunes trisomiques européens, dont des Français, la rassurent, chacun en leur langue, quant à l’avenir de son futur enfant : « Il pourra te faire des câlins, il pourra parler, aller à l’école, et te dire qu'il t'aime. Ton enfant pourra être heureux, comme je le suis ! Et tu seras heureuse aussi ! » (Regardez la vidéo ci-dessous.)

Mais le CSA juge « inappropriée » la diffusion de ce clip à la télévision française parce que « susceptible de troubler en conscience des femmes qui, dans le respect de la loi, avaient fait des choix de vie personnelle différents ».

Protestant contre cette décision, sept jeunes atteints de trisomie 21 ainsi que deux associations saisissent le Conseil d’État en septembre 2016. Mais ce dernier rejette leurs recours en confirmant la censure du CSA.

Cette vidéo a été censurée parce qu’elle risquait de troubler les cœurs et les consciences des parents qui ont choisi de supprimer in utero ces vies non désirées.

Le chroniqueur américain George F. Will a reformulé la décision du Conseil d’État sans ambages. Dans une récente tribune au Washington Post, il écrit : « La cour a affirmé, en substance, que les vies des personnes atteintes de trisomie 21 — et par une inéluctable implication, les vies de beaucoup d’autres personnes touchées par un handicap — ont une valeur négligeable par rapport au désir des parents d’avoir un enfant qui n’a aucun besoin particulier, à savoir dérangeant. »

Exemple flagrant d’une sensibilité morale pervertie, cette vidéo « offensante » a été censurée parce qu’elle risquait de troubler les cœurs et les consciences des parents qui ont choisi de supprimer in utero ces vies non désirées.

Ce court film est marquant parce qu’il illustre avec beaucoup de vivacité l’humanité si touchante de ces enfants atteints de trisomie, tout comme la joie et la satisfaction authentiques que leurs parents éprouvent en les élevant.

Je me sens personnellement concerné par cette affaire. Et pour cause, je suis fier d’être le père d’un fils de douze ans qui est atteint de trisomie 21 (George Will a aussi un fils adulte trisomique), et je peux certainement m’identifier avec les craintes de la future mère dans cette fameuse vidéo. Si à la naissance de notre fils, mon épouse et moi-même avions pu avoir un aperçu de tout le bonheur que nous aurions en l’élevant, notre choc et incrédulité initiaux auraient été en grande partie dissipés.

Avant la naissance de mon fils, Yéhouda, je ne m’étais jamais cru capable d’élever un enfant atteint de trisomie 21. Mais cet état d’esprit est essentiellement fondé sur l’ignorance pure et les valeurs perverties qui sévissent dans nos sociétés, et même, à mon grand regret, dans les communautés juives. Quand nous réduisons nos enfants à des simples « distributeurs automatiques de fierté parentale » ou à des vulgaires figurants dans nos existences si parfaites, la photo d’un enfant handicapé n’est pas le genre de clichés que vous désirez poster sur votre page Facebook.

La photo d’un enfant handicapé n’est pas le genre de clichés que vous désirez poster sur votre page Facebook.

Je ne souhaite pas minimiser le défi d’élever des enfants ayant des besoins particuliers ; c’est là une tâche difficile qui comporte des défis uniques (essayez de consacrer trois heures par jour pendant un an à monter et descendre des escaliers à quatre pattes avec votre bambin, et ce dans le cadre de son programme d’intervention précoce !) Mais lorsque l’accent est mis sur la volonté de remplir le rôle confié par Dieu consistant à aider notre enfant à réaliser pleinement son potentiel, la satisfaction est aussi profonde que celle procurée par l’éducation d’un enfant ordinaire, et parfois même davantage.

Le secret est de croire en le potentiel de votre enfant et de ne jamais le sous-estimer. Un exemple récent : nous avions décidé que notre fils Yéhouda devrait essayer de lire dans le Séfer Torah à l’occasion de sa bar-mitsva qui approchait. Ma femme était persuadée qu’il en serait capable ; pour ma part, je l’étais un peu moins, mais j’ai décidé de tenter le coup et de ne pas le disqualifier avant qu’il ait eu l’occasion de faire ses preuves. Résultat : il lui a suffi de quatre jours pour maîtriser le passage de sa montée à la Torah ; visiblement, il avait ça dans le sang ! Ma femme et moi, et le reste de nos enfants étions tout simplement ahuris par sa performance si réussie. Et puis surtout, Yéhouda était rayonnant de fierté et débordant d’assurance, le genre d'assurance qui vous vient uniquement lorsque vous vous donnez de la peine et accomplissez un exploit authentique. Et c'est là un principe qui vaut pour tous les enfants, qu’ils soient atteints de trisomie ou non.

L’ancien vice-président américain Hubert Humphrey disait : «  Le test moral d’un gouvernement se reflète dans la façon dont il traite ceux qui sont à l’aube de la vie, les enfants ; ceux qui sont au crépuscule de la vie, les aînés ; et ceux qui sont dans l’ombre de la vie, les malades, les nécessiteux et les personnes handicapées. » La récente décision du Conseil d’État renforce la vision pervertie voulant que certaines vies vaillent plus que d’autres, et prouve l’état inquiétant de son baromètre moral.

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