Société

Lorsque les victimes du terrorisme ne sont pas juives

18/07/2016 | par rabbin Benjamin Blech

Le terrorisme à Nice et l’indignation sélective du monde

Nice a toujours été jusqu’à présent la capitale de la French Riviera. Fondée par les Grecs il y a bien longtemps, elle est devenue un lieu de vacances pour l’élite : les hommes de culture, les artistes, les libéraux et les intellectuels se délectaient de son statut symbolique de paradigme du paradis au 21ème siècle.

Aujourd’hui, Nice a rejoint la liste géographique des victimes tragiques du terrorisme. Ces noms de ville sont des rappels puissants de la menace universelle à la société civilisée. Ce n’est plus seulement Jérusalem ou Tel-Aviv. C’est Paris et Bruxelles, San Bernardino et Orlando, Istanbul and Dhaka.

Et donc la boucle est bouclée.

Pendant des années, l’Europe était au premier plan pour justifier ces atrocités commises par les Palestiniens: des actes terroristes tuant des innocents, des assassinats de Juifs en prière, d’enfants endormis dans leur chambre à coucher, de mères devant leurs enfants - tout ceci était permis avec la logique tortueuse que des gens qui pensent n’avoir pas d’autre alternative ont moralement le droit de perpétrer des actes de violence brutale et barbare.

Le meurtre de masse est-il jamais tolérable sachant que ses bourreaux sont convaincus de la noblesse de leur objectif ultime ?

Mais actuellement, le monde doit nécessairement se poser une question : quand le terrorisme cesse-t-il d’en être ? Le meurtre de masse peut-il être tolérable sachant que ses bourreaux sont convaincus de la noblesse de leur objectif ultime ? Peut-il y avoir une quelconque justification pour conduire un tracteur et foncer dans une foule de gens célébrant la fête nationale, soi-disant pour offrir des glaces aux gens en fête, et en réalité pour tuer et blesser des petits enfants, ainsi que des centaines d’autres personnes sur son passage ?

Je me permets de poser cette question, car la réaction à la tragédie de Nice a été significative par son choix de mots ; ses porte-paroles ont en effet employé un vocabulaire qu’ils réfutaient très souvent et très clairement par le passé.

Ecoutons les dirigeants musulmans unis dans la condamnation de l’attaque et appelant à une lutte commune contre l’extrémisme car, comme ils l’affirment pieusement, ils sont opposés à toute forme d’extrémisme.

Ecoutons le ministre des Affaires étrangères des Emirats arabes unis, le Sheikh Abdulla bin Zayed Al-Nahyan : « Suite à ce crime terroriste haineux, il est impératif d’œuvrer avec résolution et sans hésitation pour contrer le terrorisme sous toutes ses formes et manifestations. »

Prêtons l’oreille à Al-Azhar, le dirigeant du centre d’étude principal de l’islam Sunnite qui a affirmé que cet « attentat terroriste pervers » contredit l’islam et enjoint le monde à unir ses efforts pour « vaincre le terrorisme et débarrasser le monde du mal. »

Ecoutons aussi l’Iran qui a décrié également « l’incident terroriste criminel » à Nice. « Comme nous l’avons exprimé à de nombreuses reprises par le passé, le terrorisme est un phénomène vil qui ne sera éradiqué que par l’unité et la collaboration internationale », a indiqué le porte-parole du ministre des Affaires étrangères Bahram Ghasemi.

L’imam égyptien Shawki Allam, un personnage haut-placé, a pour sa part condamné l’assaillant en le qualifiant d’« extrémiste ». « Ceux qui commettent de tels crimes répugnants sont corrompus sur terre, et suivent les traces du Satan… ils sont maudits dans cette vie et dans la suivante. »

Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a dénoncé « dans les termes les plus sévères cet acte terroriste pervers », a déclaré son bureau.

Le chef de la Ligue Arabe Ahmed Abul Gheit a condamné le « lâche attentat terroriste» a déclaré son porte-parole.

Ce qui s’est passé à Nice est condamnable, car c’est le genre de violence dont les victimes ne sont pas juives, et les cibles non-israéliennes. Mais lorsqu’il s’agit d’une place de marché à Tel-Aviv ou d’une chambre à coucher à Kiriat Arba, tous les porte-paroles hypocrites employant un ton modéré et qui aimeraient nous faire croire qu’ils sont opposés en principe au meurtre inspiré par des motifs fanatiques et visant des victimes innocentes, gardent le silence.

Il est à la fois étrange et épouvantable que dans le même temps, le monde condamne avec une grande ferveur le terrorisme fanatique contre certains pays, tout en continuant à justifier ces mêmes crimes commis contre ceux pour lesquels ils partagent la haine et l’animosité. Et c’est précisément en raison de cette hypocrisie - la croyance implicite que « mon terrorisme n’est pas le tien » - que la civilisation est tellement en péril.

Combien de temps le monde va-t-il faire les louanges des terroristes dans un coin du globe et penser qu’ils n’auront pas le statut de victimes partout ailleurs ?

Le calendrier juif nous a depuis longtemps mis en garde contre cette approche. Le jour le plus tragique de l’année juive est le 9 Av, Ticha Béav. En ce jour, les deux Temples ont été détruits. C’est un jour de jeûne et de deuil, visant à s’assurer que nous n’oublions jamais les événements tragiques qu’il commémore, ainsi que nos manquements spirituels qui ont contribué aux terribles événements de ce jour. Mais ce qui est remarquable, c’est que trois semaines avant le 9 Av, dimanche prochain, nous observons un jour supplémentaire de jeûne et de deuil. C’est le 17 Tamouz. Ce jour-là, le Temple n’a pas encore été détruit. Mais on doit tout autant s’en souvenir, car c’est le jour où une brèche a été faite dans les murailles de Jérusalem. Ce fut le début de la fin - et le début de notre chute doit être remémoré autant que le jour de la tragédie finale.

C’est un message qui s’applique avec force à notre époque. Le jour où les murailles sont d’abord tombées, qui ont permis à la suite des événements de se produire, fut le jour où le monde a manqué de réagir au terrorisme, bien que ce ne fût pas leur maison qui brûlait ou leurs enfants, brutalisés ; lorsque c’était Tel Aviv et non Paris, Jérusalem et non Istanbul, lorsque c’étaient des Juifs fêtant le séder de Pessah dans la station balnéaire de Netanya, et non de fiers citoyens français dans la belle capitale de la Riviera.

Le terrorisme ne semblait pas une menace si terrifiante lorsque la muraille de la conduite civilisée a été ébranlée pour la première fois. Mais inexorablement, le 17 Tamouz est suivi de Ticha Béav. Ce mal n’a pas été confronté, a soulevé peu de protestations, il a désormais remporté la première étape vers la victoire.

Quand le monde comprendra-t-il enfin le message ? Combien de temps le monde va-t-il continuer à faire l’éloge des terroristes dans un coin du globe et assumer aveuglément qu’il n’obtiendra pas le statut de victime partout ailleurs ?

Notre sort repose sur la bonne réponse.

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