Éducation

Élever des enfants bienveillants

28/10/2013 | par Slovie Jungreis-Wolff

Comment encourager nos juniors à être plus sensibles et attentifs aux autres?

« T’es dingue ! »

« Pauvre cinglée. »

« Personne ne veut jouer avec toi ! Rentre chez toi ! »

On peut imaginer combien ces phrases assassines lancées par des gamins de 4 ans contre leur petite camarade d’école peuvent meurtrir le cœur de sa maman.

On peut bien sûr répondre que « tes enfants sont ce qu’ils sont, et ils agissent comme tels ». On peut toujours consoler la maman de cette petite fille en lui rappelant que ces gosses vont grandir, qu’elle ne doit pas faire cas de leurs conduites et plutôt conseiller à sa fillette de se faire d’autres amis.

Oui mais voilà : ces gosses ont été méchants. Ils ont dit des choses affreuses. Or une telle méchanceté n’a pas sa place dans le cœur de nos enfants, qu’ils aient 4 ou 14 ans. Mais cela n’est pas inéluctable. On peut toujours mieux faire !

Car n’oublions pas qu’un enfant méchant deviendra un adulte méchant. Il fera particulièrement mal à son entourage et se défendra en accusant les autres d’être trop sensibles. Il détruira son mariage et fera du mal des enfants, en se dédouanant en permanence de leur responsabilité.

Je me suis souvent demandé comment nous pouvions aider nos enfants à être plus sensibles. On entend trop de faits-divers tragiques au sujet d’enfants qui n’ont pas supporté d’être bafoués. Comment peut-on éduquer des enfants à être bienveillants à l’égard d’autrui?

1. Selon quels critères jugeons-nous la réussite de nos enfants?

Commençons par nous demander ce qui définit à nos yeux l’enfant idéal : le fait qu’il ait des bonnes notes à l’école ? Qu’il soit très populaire ? Qu’il remporte des trophées sportifs ? Qu’il soit un musicien prometteur ?

Avons-nous jamais pris en considération sa propension à s’intéresser à son prochain ? Ou à être gentil et attentionné?

Puis-je décemment considérer que mon enfant est exceptionnel parce que son QI est supérieur à la moyenne ou qu’il me ramène des bulletins trimestriels dithyrambiques quand, quelques minutes plus tard, il insulte copieusement sa sœur au moment du repas ?

Les enfants qui n’hésitent pas à faire pleurer leurs semblables, qui restent indifférents à la peine qu’ils causent à autrui, ou qui refusent tout contact avec ceux qu’ils qualifient d’inférieurs à eux-mêmes sont des sujets qui présentent un défaut majeur de la personnalité. Et le fait qu’ils soient par ailleurs des artistes talentueux, des sportifs accomplis ou des petits génies ne changent rien à la donne : il leur manque un élément essentiel. Et cela doit m’interpeller en tant que parent. Je DOIS agir ! J'ai failli dans l’éducation de mon enfant. Il lui manque ce supplément d’âme qui lui permettra de devenir un homme à part entière…

Réfléchissez un peu: à quand remonte la dernière fois où votre enfant s’est s’intéressé à autrui ? A-t-il récemment fait preuve de gentillesse ou d’attention aux besoins d’un autre ?

Je n’inclus pas ici son cercle d’amis ou une personne qu’il a “à la bonne”. Je demande s’il a témoigné de la bienveillance envers quelqu’un auquel il ne s’intéresse pas généralement ou qui ne fait pas partie de sa sphère sociale habituelle.

2. Les six questions que tout parent doit se poser

Pour évaluer les prédispositions de votre enfant à la compassion, répondez le plus honnêtement possible aux questions ci-dessous.

  1. De quelle façon mon enfant joue-t-il avec les autres ?

  2. Réagit-il avec prévenance quand ses camarades se blessent ou sont mis à l’écart ?

  3. S’excuse-t-il s’il fait de la peine à autrui ? Ou bien feint-il de l’ignorer ?

  4. Dénigre-t-il ou se moque-t-il souvent ses camarades ?

  5. Mon enfant s’embarque-t-il souvent dans des prises de bec, des disputes ou des conflits ?

  6. Mon enfant est-il méchant ?

Et ne cachez pas votre enfant derrière votre petit doigt ou derrière des prétextes futiles du type : « il est fatigué », « il a beaucoup de travail scolaire en ce moment », « ça lui passera avec l’âge » ou « de toute façon, personne ne supporte ce gosse bizarre ». Car ce faisant, vous ne ferez qu’arroser la mauvaise herbe de la méchanceté.

3. Eveillez vos enfants à la bienveillance

Certes les jeunes d’aujourd’hui s’investissent dans des opérations de charité comme jamais auparavant. Un jour, ils courent un marathon, puis font un tournoi de bowling, une course cycliste ou un concours de pâtisserie au profit de telle ou telle cause humanitaire. On ne compte plus les soirées « Découvertes des saveurs du monde », les ventes aux enchères, les concerts de bienfaisance, les défilés de mode et autres galas de soutien dont les profits conséquents sont reversés aux personnes nécessiteuses. Les organisateurs y consacrent souvent un temps considérable et une énergie énorme. Mais tout cela reste grisant, parfois même clinquant, et toujours fun ! Il n’y a là aucun esprit de sacrifice, ni même un contact avec ces fameuses personnes dans le besoin. Rien qui n’impacte l’âme d’un ado. La triste réalité du monde restera cachée à ses yeux, et son cœur restera fermé à la compassion.

Je ne veux pas dire qu’il faille confronter nos enfants à toutes les horreurs du monde actuel jusqu’à les traumatiser. Mais j’affirme que nous nous méprenons si nous pensons que nos enfants deviennent altruistes grâce à ce genre d’actions ; loin s’en faut ! Organiser des soirées à thème et autres concerts n’a jamais rendu personne plus gentil.

Ce qui nous incombe, c’est d’enseigner à nos enfants le souci de l’Autre et de son bien-être. Certes, il n’est pas facile de traverser la cour pour aller parler à la nouvelle élève que tout le monde bat froid, mais c’est ce genre de geste qui fera de notre enfant un être plus sensible et plus attentionné.

Prenons un exemple concret : votre garçon est doué en sports. Dites-lui que Dieu l’a gratifié d’un cadeau extraordinaire, et qu’il se doit de l’utiliser pour améliorer le monde.

Comment cela, me direz-vous ? A la prochaine occasion, quand votre ado sortira avec ses copains pour jouer au football, dites-lui de prendre le temps de s’arrêter une seconde. De jeter un coup d’œil autour de lui. De repérer ce gars dans les tribunes à qui personne ne parle. De se dire qu’il espère très certainement qu’aujourd’hui sera différent, qu’aujourd’hui quelqu’un fera cas de lui. Que ce quelqu’un, ce sera toi mon fils, et que tu feras de ce jour un jour meilleur pour le monde. Parce qu'en prononçant cette simple phrase : « Veux-tu jouer avec nous ? », tu changeras entièrement la vie de ce jeune garçon solitaire.

La vie est pleine d’opportunités pour nos enfants de devenir meilleurs en faisant preuve de bienveillance envers autrui. Encore faut-il qu’ils ouvrent leurs yeux à ce qui les entoure.

Tout comme nous d'ailleurs…

Car dans ce domaine comme dans tout autre sujet lié à l’éducation, rien ne vaut l’exemple donné aux enfants par leur propre parent. Quand votre ado vous verra répondre agréablement respectueusement à vos interlocuteurs, dépanner cordialement avec empressement vos voisins, et tout simplement être attentif aux besoins de votre propre époux(se), il comprendra de lui-même comment une telle attitude est bénéfique pour tous, et d’abord pour celui qui s’y tient.

Apprenons à nos enfants qu’ils peuvent vraiment changer le monde, juste tout simplement en partageant leur goûter à la récréation, ou en proposant à un autre enfant de jouer avec lui.

L'enfant qui a faim et n'a pas de goûter à la récré, le camarade de classe qui est assis seul à la cantine, l'enfant qui n'est jamais invité à dormir chez un autre ou à se joindre à la soirée pizza du dimanche – tous ces enfants ont besoin d'attention.

Trop d'enfants vont à l'école le cœur brisé ; et pourtant, personne ne relève jamais leur peine. Expliquons à nos enfants qu'ils peuvent réellement changer le monde par un simple sourire, un bonjour, un goûter partagé, une invitation à jouer.

Vous constaterez que votre enfant sera le premier bénéficiaire du bien qu’il prodiguera à autrui. En réchauffant le cœur d’un autre, c’est son propre cœur qui sera inondé de bonheur et de plénitude. D’ailleurs, n’est-ce pas ce que vous ressentez vous-même dans la même situation ?

4. Mettez un pare-feu aux Mots Qui Tuent en ligne !

Nous vivons dans un monde où il est malheureusement facile de blesser autrui. Quelques mots acides diffusés à l' infini par un clic de souris informatique peuvent faire détruire la vie d’une personne. J'ai parlé à des jeunes qui ont littéralement été anéantis par de méchants ragots diffusés sur le Net. Humiliés, ils n'ont même plus le courage d'affronter le regard de leurs camarades de classe.

Trop souvent, nos enfants n'ont aucune idée de l'impact de tels messages qui se propagent de façon endémique. Ils voient rarement les conséquences dévastatrices de ces rumeurs à la fois hasardeuses et assassines. En général ils rient de tout cela, totalement ignorants du fait que leur texte est partagé dans le cyberespace, encore et encore, à l’infini, et exportent le mal.

Il est grand temps de leur faire prendre conscience des conséquences de telles exactions. Parce que rien ne peut faire revenir les mots jetés en pâture sur le Net. Parfois même, ce sont des photos compromettantes qui sont diffusées. Il faut avoir rencontré des victimes de ce genre d’agissements pour comprendre ce que peut être leur souffrance. Avoir vu leurs yeux s’emplir de larmes et leurs joues encore rougies de honte, des années après les faits.

La Torah interdit de causer du tort et de la peine à toutes les créatures vivantes de Dieu, y compris aux animaux. Si nous sommes déjà tenus d’épargner toute souffrance aux bêtes, nous pouvons aisément comprendre combien nous devons être vigilants à ne pas blesser un autre être humain !

5. La gentillesse s’apprend à la maison

Vous revenez tout juste du supermarché. Vous entrez chez vous avec six sachets bien remplis à chaque bras. Votre ado vous regarde entrer sans bouger.

« J’ai faim » lance-t-il. « Y’a rien à manger dans cette baraque ? »

Voilà le moment idéal pour agir ! Ne laissez pas passer cette opportunité d'apprendre à votre échalas de 16 ans à ouvrir les yeux et à se rendre utile !

« Mon grand, tu ne vois pas que je suis encombré(e) avec tous ces sacs ? Tu ne veux pas plutôt m’aider à transporter tout ça au lieu de crier famine ? »

Et voila ! Inutile de ronger votre frein inutilement ! Sans cri ni colère, vous apprenez à votre enfant à être plus sensible à ce qui se passe autour de lui.

Nombreuses sont les personnes incroyablement dévouées à leurs amis, mais négligent complètement leur famille. Elles laissent tout tomber pour les autres, dépensent sans compter leur temps et leur énergie dès qu’on le leur demande. Mais si leur époux(se) ou leurs enfants font la même requête, elle ont soudainement un bon prétexte pour ne pas y répondre favorablement. Les enfants ne sont pas dupes de ce genre de dérobade, et réalisent très vite que leur fratrie ou leurs parents sont sympas avec tout le monde, sauf avec eux !

Nul besoin de chercher midi à quatorze heures : les enfants gentils proviennent de familles où la gentillesse est de mise. Comme dit le proverbe, charité bien ordonnée commence par soi-même.

Eduquons nos enfants à être sensibles et généreux, en paroles comme en actes. Rien ne justifie qu’un enfant soit méchant. Si nous veillons à incarner ces valeurs de gentillesse et de souci de l’autre et que nous faisons preuve de compassion envers autrui malgré la pression et les défis du quotidien, alors nos enfants saisiront l’intérêt majeur qu’il y a à être plus bienveillant.

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