Réflexions Pessah

Pessah en blanc et noir

19/03/2012 | par Aish.fr

Pourquoi la Haggadah de Pessah considère t-elle Lavan comme le pire ennemi du Peuple Juif ?

L’histoire du monde abonde de personnages diaboliques qui tentent de détruire le Peuple juif. La Haggadah de Pessah nous rappelle qu’on les retrouve dans toutes les générations. Et que D.ieu nous sauve à chaque fois. La Haggadah met cependant l’accent sur un individu en particulier qui fut pire que les autres. Et le gagnant serait…Pharaon ? Non, curieusement il s’agit de Lavan, le beau-père roublard de notre ancêtre Yaacov (Jacob) qui le trompa sous le dais nuptial et tenta sans cesse de tricher et d’abuser de lui.

On peut se demander pourquoi Lavan fut le pire, de tous les mécréants, bandits, despotes, dictateurs ayant du sang juif sur les mains durant les 2000 ans d’histoire juive antérieure à l’écriture de la Haggadah. Pharaon n’eut pas eu droit à ce titre bien que ce roi se baignât littéralement dans le sang de 300 enfants juifs chaque jour pour améliorer la condition de sa peau.

La Haggadah explique que Pharaon s’avéra être un ennemi moindre que Lavan « car Pharaon avait décrété que les enfants mâles soient mis à mort alors que Lavan voulait supplanter le peuple entier . » Qu’est-ce que cela signifie ?

Pour comprendre ce profond message de nos Sages, nous devons nous référer à l’affrontement biblique de Lavan et Yaacov. Après avoir travaillé loyalement pour Lavan pendant des années et bien qu’il ait été sans cesse trompé, Yaacov prend ses biens et sa famille, tous obtenus honnêtement et de bonne foi, et quitte la maison de Lavan pour toujours. Lavan poursuit Yaacov et l’accuse d’un crime si surprenant qu’une explication s’impose. « Ces filles sont mes filles, et ces fils sont mes fils et ce bétail est le mien ; tout ce que tu vois m’appartient. »  (Genèse 31 :43). Lavan ose revendiquer ces biens et personnes bien que Yaacov lui ait rappelé les 20 années de labeur qu’il lui donna sans broncher malgré nombre de tricheries. Sur quelle base pourrait bien être fondée cette revendication de Lavan sur le fruit labeur de Yaacov ?

La couleur blanche

La réponse réside dans le nom de « Lavan ». Le mot hébreu Lavan signifie « blanc ».Cette couleur représente le potentiel de toute couleur dans le spectre lumineux. Si l’on place en effet toutes les couleurs sur une roue que l’on ferait tourner très vite, on constate que les couleurs se fondent en une seule, la blanche.

Le blanc est une couleur qui a le potentiel de tout recevoir mais sans engagement de sa part en contrepartie.

La force du blanc réside dans le contraste qu’il offre. Le blanc est le total opposé du noir. D’ailleurs, une vérité est souvent qualifiée de noir sur blanc. Pourtant le blanc ne dépend d’aucune couleur, et demeure, dans sa forme la plus pure, blanc - le potentiel de tout recevoir mais sans engagement de sa part en contrepartie.

Cette unique caractéristique dépeint l’individu nommé Lavan. Lavan était un escroc, concluant un accord mais le changeant en dernière minute. Il pouvait paraître amical un instant puis hostile la minute suivante, changeant de couleur à sa guise pour parvenir à ses fins, mais sans jamais s’engager particulièrement, ne reposant sur rien de tangible. La vérité absolue n’existait pas pour Lavan. Sa seule réalité était le champ infini de possibilités, le potentiel de n’importe quelle couleur.

Yaacov était son exact opposé. Totalement dévoué et dédié à sa croyance, il personnifiait l’engagement sans faillir à accomplir la volonté de D.ieu. Yaacov était noir sur blanc, la vérité d’autant plus criante car se détachant sur un fond blanc, le « Lavan » sur lequel il construisit la famille qui allait devenir le Peuple juif.

Une tentative de tout supplanter

Lavan le comprit et sut que Yaacov allait se renforcer et se raffermir davantage sur le fond blanc qu’il lui offrait. Sa revendication sur tous les biens de Yaacov ne reposait sur aucun fondement légal. L’accusation était d’une autre nature, bien plus profonde. : «  Je t’ai fait devenir ce que tu es, tu m’es donc redevable ». Techniquement, Lavan avait raison : il contribua d’une certaine façon à forger l’identité de Yaacov. Son extrême roublardise et sa constante malhonnêteté fit simplement ressortir plus nettement encore la différence existant entre Yaacov et Lavan. Devant ce constat, chacun s’ancra encore davantage dans sa voie. Avec un tel argument, Lavan pensait pouvoir s’approprier tout ce que Yaacov avait en sa possession, revendiquer sa famille comme étant la sienne et établir la prédominance du blanc sur le noir, en d’autres termes rester au royaume des possibilités sans être obligé de choisir ni de s’engager.

Lavan revendiqua certes la famille de Yaacov comme étant la sienne, mais cette revendication ne reposait sur aucun fondement, prouvant une fois de plus l’habilité de Lavan à déformer les faits à son avantage.

Si Lavan avait eu gain de cause, il aurait supplanté le Peuple juif et le potentiel de prétendre à des valeurs plus élevées aurait été perdu à jamais. Pharaon n’aurait pu tuer les nourrissons juifs car il n’y en aurait plus jamais eu. Mais Yaacov résista et le noir pour lequel il combattit, son engagement envers le ciel, remporta la victoire contre le non-engagement personnifié par Lavan.

Les mystiques considèrent cette bataille comme le thème central de Pessah. Le Rav Elyahou de Vilna vit dans l’affrontement de Yaacov et Lavan notre future survie pour rester ancrés dans nos valeurs tandis que nous serions plongés au cœur de la société hédoniste égyptienne vantant un choix infini de possibilités dans le monde, sans prendre position pour aucune d’entre elles. C’était une société enlisée dans la magie noire aux fins de décupler à l’infini les choix dès que s’épuisaient les options naturelles de la vie.

Dénoncer le…vide

La sortie d’Egypte nous donne les outils nécessaires pour résister contre ces mêmes pressions exercées sur notre génération pour transformer ce qui est noir sur blanc en une roue offrant une variété infinie de couleurs. Un rabbin israélien raconte l’histoire suivante : Un simple paysan se rendit au cinéma pour la 1ère fois de sa vie. Il fut fasciné par les couleurs vives et les images plus grandes que nature. Les scènes lui parurent si réelles qu’il voulut s’approcher. Il alla examiner l’écran de plus près avec sa lanterne. A sa grande stupéfaction, tout ce qu’il put voir en s’approchant était Lavan, blanc.

La Haggadah nous enjoint de nous considérer comme étant sortis nous-mêmes d’Egypte. Mais la roue ne cesse jamais de tourner et de plus en plus vite. Ainsi, certains éléments de la société suggèrent que l’idée même de la Foi, notion de vérité absolue, est dépassée. Pourtant, en éclairant ce relativisme avec notre lanterne, nous réalisons qu’au-delà de ces explications si élaborées ne se trouve que le blanc, autrement dit rien… si ce n’est le vide.

Pessah nous permet de défendre nos croyances, d’éclairer l’écran que certains prennent pour la réalité et le démasquer comme le Lavan qu’il est réellement.

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