Yom Kippour

Mais de quoi dois-je me faire pardonner ?

17/09/2015 | par Elie Akoun

L’itinéraire émouvant de deux frères, liés pour toujours par Yom Kippour…

On ne se souviendra jamais assez de ce Yom Kippour 2002. Mon frère Jonathan et moi étions assis sur le balcon de l’appartement de nos parents et discutions du programme de la journée. Il faisait un temps couvert et nous hésitions à nous rendre à la synagogue. Chaque année, nous y faisions un rapide passage, car nous voulions montrer notre appartenance au peuple juif. Le reste de la journée, nous jeûnions, tout en vaquant à nos activités.

Cet après-midi là, nous étions donc en train de discuter de la signification de Kippour. Jonathan me dit alors : « C’est beau l’idée de demander pardon. Mais franchement, de quoi pourrait-on bien se faire pardonner ? ». J’acquiesçais, persuadé, même en cherchant bien, que je n’avais rien à me reprocher.

Lorsqu’on sait que nous ne respections pas chabbath, que nos fréquentations n’étaient pas toujours des plus recommandables et que nous étions en quelque sorte de vrais « Juifs de Kippour », cette question a de quoi faire sourire. Pourtant, nous étions très sérieux…

Qu’est-ce qui peut faire que deux jeunes gens sincères s’éloignent tellement du judaïsme qu’ils ne comprenent plus la signification de ce jour si important ?

Mes conclusions sont simples et tiennent à quelques points :

Le conditionnement

Nous vivons dans une société de technologie et de loisirs qui veut que tout aille vite. Les informations, les transports, les images, les conversations. On a même trouvé un moyen d’abréger les écrits avec les textos. On est pressé et on ne se laisse plus le temps pour réfléchir. Dès le plus jeune âge, avec l’ordinateur, la télé et les jeux électroniques, on est conditionné à enchaîner, en fait à s’enchaîner… Dire pardon ? Revenir sur notre comportement : oui, mais vite, pas toute la journée !

Comment sortir du cercle vicieux ?

L’égo

Nous sommes tous plus ou moins victimes de notre égo. Il est en fait un miroir déformant. On se regarde dans la glace et on se voit plus beau, plus grand, plus irréprochable que les autres. Les valeurs dont se nourrit l’égo ne sont pas forcément celles qui vont apporter le bonheur. Mais qu’importe, l’habitude l’emporte et l’on continue à courir après la réussite et la reconnaissance sociale, la détente, les plaisirs, les sensations fortes. Tout cela donne beaucoup de satisfaction à notre égo mais nous rend en général insensible à l’autre. C’est l’une des raisons du taux élevé de divorces : il faut avant tout se satisfaire avant de satisfaire son conjoint. Comment sortir de ce cercle vicieux ?

L’insatisfaction

Ce phénomène est lié aux deux causes précédentes. Parce qu’on ne prend pas le temps nécessaire à l’introspection et que l’on veut avant tout croire en notre toute-puissance, on se heurte à un mur, celui de la réalité. Car la vie nous rattrape : finalement, il y a des imprévus. L’échec à un examen, la perte d’un emploi, la mort d’un proche, ou même le train-train quotidien qui n’apporte pas que des satisfactions. On aimerait bien trouver des réponses mais on ne s’est jamais posé les vraies questions. On rêve d’une vie plus belle, plus épanouie, plus intense, mais on n’a pas la clef pour entrer dans cette existence-là. Nos relations avec nos proches sont parfois conflictuelles. Que faire ?

Le manque de connaissances

Je me souviens que le Rabbin de notre synagogue avait évoqué le fait que la majorité de notre communauté transgressait le chabbath. Mon frère et moi, nous avions trouvé cela dramatique, nous qui ne prononcions que le kiddouch du vendredi soir sans respecter aucun autre commandement ! Lorsque je voyais des gens faire le birkath hamazone en semaine (bénédiction de la fin du repas, ndlr), je m’étonnais car nous ne le faisions qu’après le premier repas de chabbath…. Un jour, j’assistais à un cours consacré à Abraham. À la fin, le jeune homme assis à côté de moi s’approcha du Rav. Il avait pris des notes durant toute l’heure et demanda, studieux : « Votre conférence était très intéressante. Seulement, un point m’échappe : Qui est Avraham Avinou ? ». Comment renouer avec notre identité ancestrale ?

Car s’il peut arriver à l’homme de se tromper, ce n’est pas le cas de D.ieu.

Yom Kippour répond à toutes ces questions. Il faut d’abord consacrer un peu de temps à l’étude. Tenter d’emmagasiner quelques connaissances fondamentales et même plus si affinités. Ensuite, en reconnaissant qu’il y a un Maître du monde au-dessus de nous et en prenant le temps d’intérioriser cette dimension de notre existence, on marque la première étape vers une prise de conscience essentielle : on ne peut pas tout contrôler et c’est tant mieux. Car s’il peut arriver à l’homme de se tromper, ce n’est pas le cas de D.ieu. Remettons-nous à Lui, Il sait mieux que nous ce qui fera notre bonheur. Entre Roch Hachana et Yom Kippour, nous avons dix jours pour nous concentrer sur cette idée. Une fois que le jour J est arrivé, prenons notre temps. Il nous reste 24 heures pour monter les échelons spirituels qui feront de nous des hommes semblables aux anges. Pas ceux des dessins animés avec des ailes dans le dos mais les vrais anges, capables de remplir leur mission sans faillir. N’y a-t-il pas plus grande satisfaction que d’identifier puis de remplir le rôle qui nous a été attribué ? En jeûnant, en ôtant nos chaussures de cuir, en se concentrant sur nos devoirs envers notre prochain et envers le Créateur, en priant de tout notre cœur, nous nous libérons d’un conditionnement pour en choisir un autre : celui du Juif fidèle, capable de rendre le monde meilleur.

Aujourd’hui, lorsque je repense à ce Yom Kippour 2002, et que je revois mentalement mon frère Jonathan si beau et si jeune, j’ai le cœur qui se serre. Je me dis que je n’aurais pas dû attendre sa mort tragique, dans un accident de moto, pour réveiller l’âme juive qui sommeillait en moi. Je verse des larmes et je regrette d’avoir attendu d’être devant sa dépouille mortelle pour lui dire pardon. J’aurais dû le faire plus tôt. C’est pourquoi je vous livre aujourd’hui ce message de Yom Kippour : nous sommes tous capables de revêtir nos vêtements de Juifs. Ne différons pas l’essayage.

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