Monde Juif

À la mémoire de Steven Sotloff

04/09/2014 | par Yvette Miller

Le journaliste cruellement assassiné par les djihadistes de l’État islamique était un juif qui se rattacha fermement à ses racines durant sa captivité.

« Je vous adresse un message à vous, Abou Bakr al-Baghdadi al-Quraishi al-Hussaini, le calife de l'État islamique. Je suis Shirley Sotloff. Mon fils Steven est entre vos mains. Vous, le calife, pouvez accorder l'amnistie. Je vous demande s'il vous plaît de libérer mon enfant. En tant que mère, je demande à votre justice d'être miséricordieuse et de ne pas punir mon fils pour des choses sur lesquelles il n'a aucun contrôle. »

Ce sont par ces mots poignants que Shirley Sotloff, mère du journaliste américain Steven Sotloff enlevé en août 2013 par les djihadistes de l’État islamique, a supplié leur chef autoproclamé d’épargner son fils.

Mais visiblement son appel est tombé dans l’oreille d’un sourd puisque le 2 septembre, le groupe terroriste a mis en ligne une vidéo inhumaine montrant la décapitation de Steven Sotloff. Deux semaines après celle de son collègue James Foley et suite à laquelle Sotloff avait été menacé d’exécution si les États-Unis poursuivaient leurs frappes aériennes dans le nord de l’Irak.

Ce que peu de gens savaient alors c’est que Steven Sotloff était un juif qui possédait également la nationalité israélienne. Natif de Miami, ce petit-fils de survivant de la Shoah et fils d’une enseignante de Talmud Torah, avait fait son Alyah en 2005, à l’âge de 22 ans. Il avait ensuite poursuivi ses études au Centre Interdisciplinaire d’Hertzlia.

Il travaillait pour des médias israéliens comme le Jerusalem Report ou le Jerusalem Post et faisait profiter ses collègues israéliens de son expérience de journaliste basé dans des capitales arabes. Il est évident que ni son nom à consonance juive, ni ses liens avec Israël ne constituaient un atout professionnel pour un reporter qui partageait son temps entre la Lybie, le Yémen ou le Bahreïn. Alors Sotloff évitait d’étaler ses valeurs ou ses opinions. Mais comme il le confia un jour à l’un de ses collègues, « Google n’était pas son meilleur ami », puisqu’une simple recherche sur la Toile suffisait à mettre à jour ses origines juives

Après son enlèvement, son identité juive devint encore plus dangereuse pour sa sécurité et sa famille s’évertua à effacer la moindre trace de sa vie personnelle sur Internet. « Ils voulaient éviter un autre Daniel Pearl », se souvient un ami de la famille, en se référant au reporter américain qui avait été assassiné par les terroristes d’Al-Quaïda au Pakistant en 2002.

Mais tandis que sa famille à Miami faisait tout pour effacer son identité juive, Sotloff lui-même resta fermement attaché à ses racines tout au long de sa captivité. Selon le témoignage d’un collègue enlevé lui aussi par l’ÉI puis subséquemment libéré, le reporter américano-israélien avait tenu à jeûner durant son dernier Yom Kippour et à prier en se tenant en direction de Jérusalem. Et ce, en dépit du danger extrême auquel il s’exposait si ses ravisseurs découvraient ses agissements. « Il leur a dit qu’il était malade et qu’il n’avait pas d’appétit bien qu’ils nous avaient servi des œufs ce jour-là…  » se souvient l’ex-prisonnier. « Il semble qu’il priait en cachette en direction de Jérusalem. Il avait noté la position de prière des Musulmans et avait modifié légèrement la sienne en conséquence. »

Après le meurtre atroce de Steven, la famille Sotloff n’eut plus à cacher son identité, ni la leur d’ailleurs. Durant les heures qui suivirent l’annonce de la terrible nouvelle, de nombreux amis affluèrent vers le domicile des Sotloff pour présenter leurs condoléances aux parents et à la sœur de Steven. Et c’est le comité de leur synagogue qui se chargea de diffuser un communiqué en leur nom : « Nous espérons que tout le monde priera pour la famille et fera tout pour l’entourer. »

Dans son deuil, la famille Sotloff est enfin libre de se tourner ouvertement vers sa communauté juive pour obtenir son soutien. Et elle peut se reposer sur la certitude – et le réconfort – que durant la dernière année de sa vie, leur fils tint à renouer avec ses racines juives, quel que soit le danger auquel il s’exposait.

Nous terminerons cet hommage en empruntant les mots de Danielle Berrin, une amie d’enfance de Sotloff et collaboratrice au Jewish Journal de Los Angeles :

Je prie pour qu’au fond de ce désert fatal, au fond de cette errance sans espoir, Steven ait trouvé force et réconfort… « Des profondeurs, je clame ma détresse, écoute-moi mon Dieu, dans mon malheur… »

J’ignore si Dieu a exaucé Steven. Je sais juste que Steven possédait une étincelle divine en lui, c’était une âme en quête de vérité, un héros. Je sais que son sang, comme tout le sang juif, ne tombera jamais dans l’oubli. Et qui si sa mort éveille l’attention du monde au mal qui prolifère parmi ceux qui l’ont enlevé à nous, alors peut-être, peut-être seulement, il peut y avoir une rédemption.

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