Monde Juif

L’homme le plus vieux du monde est un survivant juif de la Shoah

14/03/2016 | par Ronda Robinson

Yisrael Kristal a 112 ans. Et il a toujours considéré son existence comme un miracle.

Le plus vieil homme vivant au monde est Yisrael Kristal, un Israélien rescapé de la Shoah âgé de 112 ans. Le secret de sa longévité exceptionnelle ? Le nouveau doyen de l’humanité l’attribue sans hésitation à Dieu, lui qui a toujours considéré son existence comme un miracle. Shoula Kouperstoch, sa fille qui vit, elle aussi, à Haïfa souligne pour sa part l’équilibre entre corps et esprit qui caractérise son père : « Il est heureux en toutes circonstances. C’est la chose la plus importante qui soit ! »

Né le 15 septembre 1903 à Tarnow, en Pologne, ce fils d’un érudit en Torah fréquente l’école primaire religieuse jusqu’à l’âge d’11 ans. Et il reste pratiquant tout au long de sa vie.

Kristal se souvient du début de la Première Guerre mondiale en 1914, quand il a 11 ans. Un autre spectacle gravé dans sa mémoire depuis un siècle est celui de François-Joseph 1er, l’empereur d’Autriche au plus long règne et le dernier monarque de la dynastie des Hasbourg, défilant dans les rues en voiture. Et les badauds de jeter des bonbons sur son passage, ces friandises qui occuperont plus tard une place prépondérante dans sa carrière professionnelle.

Son enfance est aigre-douce. Il perd sa mère avant le déclenchement de la Première Guerre mondiale. Quant à son père, il est pris en captivité par l’Armée russe et décède peu après.

Devenu orphelin, Kristal regagne à l’âge de 17 ans la ville de Lodz, qui abrite alors l’une des plus grandes communautés juives d’Europe. Il travaille comme métallurgiste puis comme ouvrier dans une fabrique de confiserie. Ce dernier emploi comporte un travail physique éreintant, comme le transport de lourds ballots de sucre. Une expérience qui présage des événements à venir dans sa vie adulte.

Plus tard, Kristal devient propriétaire d’une usine de bonbons et de chocolats à Lodz. Après l’invasion des Allemands en Pologne, lui, sa femme Haya Feige Frucht et leurs deux enfants ont l’ordre de s’installer dans le ghetto de Lodz en compagnie de 230 000 Juifs. Les Nazis souhaitaient entasser les Juifs dans des ghettos pour mieux les contrôler. Avec la promiscuité qui y règne, la nourriture et les combustibles ne tardent pas à faire défaut.

Kristal, qui est devenu expert en confiserie, peut poursuivre son métier dans le ghetto. Mais le sort de sa famille est déchirant. Ses deux enfants meurent sur place. Puis en 1944, à la liquidation du ghetto, le couple est déporté à Auschwitz. Sa femme périt mais lui-même survit, effectuant des travaux forcés à Auschwitz et dans d’autres camps de concentration. Lorsque les Alliés libèrent finalement les camps, il ne pèse plus que 37 kilos.

Pourtant, comme le confie sa fille à Aish.com, c’est à ce moment qu’il commence véritablement à vivre. Protégé par l’armée russe, il est conduit dans un hôpital où il recouvre petit à petit la santé. Une fois remis, il retourne à Lodz, reconstruit son usine de confiseries détruite pendant la guerre, et se remarie. Comme les friandises qu’il confectionne, sa vie se teinte enfin de douceur.

« Son corps était à l’écoute de son esprit. Son esprit était fort. Ses croyances étaient fortes. Alors son corps aussi est devenu fort » explique Kupesrtoch.

En 1950, il décide alors d’émigrer à Haïfa avec sa seconde femme et leur nourrisson Haïm. Lequel sera bientôt rejoint par une petite sœur, Shoula.

Fidèle à sa passion, Kristal trouve un emploi dans une usine de confiserie. C’est lui qui enseigne aux propriétaires, venus eux aussi de Pologne, comment créer une toute nouvelle ligne de bonbons. Plus tard, il ouvre son propre commerce, en fabriquant chez lui de délicieuses friandises  qu’il revend ensuite dans un kiosque à Haïfa. Parmi ses spécialités, on trouve de délicieuses petites bouteilles de liqueur en chocolat enveloppées dans des papillotes, ainsi qu’une confiture de caroube relevée d’écorces d’oranges enrobées de chocolat.

Éternel optimiste, Kristal a toujours aimé rendre les gens heureux. « La Shoah n’a pas affecté ses croyances, souligne Kouperstoch. Il est convaincu d’avoir été sauvé parce que telle était la volonté de Dieu. Mon père n’est pas quelqu’un d’amer, qui cherche à tout prix à ce que justice soit faite, il croit fermement que chaque chose qui se passe dans ce monde obéit à une raison suprême. »

Interrogé par la télévision israélienne en 2014, il avait exposé l’une de ses philosophies de vie : « Il n’y avait pas toujours de nourriture dans les camps. J’ai mangé ce qu’on m’a donné. Je mange pour vivre, je ne vis pas pour manger. » Et d’ajouter : « On n’a pas besoin de grand-chose dans la vie. »

La fille de Kristal se fait écho de ses sentiments. Elle affirme qu’elle n’a guère besoin d’un trophée mondial ; elle est simplement heureuse que son père soit en vie. Toujours est-il que vendredi dernier, le Guinness des records a sacré Kristal le plus vieil homme vivant au monde.

Guinness World Records’ Head of Records Marco Frigatti and 112-year-old Israel Kristal. Guinness World Records  Marco Frigatti, président des records mondiaux du Guinness, remet son certificat à Yisrael Kristal.
Guinness World Records

Il a cependant quatre ans de moins que la doyenne de l’humanité, l’Américaine Susannah Mushatt Jones, qui est aujourd’hui âgée de 116 ans.

À noter que dans la liste de personnes supercentenaires vivant dans le monde tenue par le Gerontology Research Group (un organisme américain de recherche en gérontologie), les 60 premières places sont occupées par des femmes. Et Robert Young, l’un des consultants du groupe, d’expliquer : « Les femmes ont tendance à vivre trois à quatre ans de plus que les hommes. » Young ajoute que la longévité n’est pas limitée à un certaine zone géographique du monde : « La durée de vie maximale est identique partout où vous irez. Chacun a le potentiel d’atteindre le même âge. »

La preuve, la liste qu’il tient comprend des supercentenaires d’Argentine, du Brésil, d’Angleterre, de France, d’Allemagne, de Jamaïque, du Mexique, de Russie, d’Espagne… et maintenant d’Israël.

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