Monde Juif

Quand musulmans et Juifs se sauvèrent mutuellement la vie – Partie II

16/05/2016 | par Yvette Miller

Ces cas remarquables où Juifs et musulmans volèrent au secours les uns des autres, parfois même au péril de leur vie.

À l’heure où les tensions entre Juifs et musulmans sont légion, le moment est peut-être venu de rappeler les dix exemples vrais suivants dans lesquels Juifs et musulmans se sauvèrent mutuellement la vie, parfois même au péril de la leur.

Cliquez ici pour lire la première partie de l’article.

6. Dons d’organes entre Juifs et musulmans

Quand un kamikaze palestinien fit exploser un bus au cœur de Tel-Aviv le 9 septembre 2002, cinq Israéliens perdirent la vie, parmi eux, Jonathan Jesner, un adolescent juif écossais qui étudiait cette année dans une école religieuse. Quelques heures avant qu’il ne succombe à ses blessures, et après avoir consulté des autorités rabbiniques, ses parents acceptèrent le prélèvement de ses organes vitaux. Ils soulignèrent le fait que Jonathan prévoyait d’entamer des études de médecine à Londres, l’année suivante. « Sauver la vie d’autrui est l’une des plus grandes valeurs du judaïsme » avait souligné Ari, le frère du défunt, à l’époque.

La décision de sa famille sauva la vie de Yasmine Abu-Rumeileh, une fillette palestinienne de sept ans, en attente d’un rein depuis deux ans. Dina Abu-Rumeileh, la mère de Yasmine, tint à rencontrer les parents de Jonathan pour leur présenter ses condoléances et partager avec eux l’espoir que d’autres s’inspireraient de l’expérience de sa fille pour « rechercher enfin la paix ».

Trois ans plus tard, un autre don d’organes fit les gros titres en Israël. Cette fois, ce fut un enfant palestinien dont les organes sauvèrent la vie d’un Juif. En novembre 2005, Ahmed Khatib, 12 ans, fut abattu par erreur après avoir brandi un pistolet en jouet devant des soldats israéliens qui faisaient une incursion dans une repère de terroristes proche. Ahmed fut évacué dans un hôpital israélien voisin. Quelques instants avant sa mort, ses parents Ismaïl et Abla Khatib décidèrent de faire don des organes vitaux de leur fils. Bien que prévenus que ses organes risquaient de profiter à des Juifs – une idée radicale pour cette famille qui vivait dans un endroit où les Juifs sont communément appelés ennemis – ils maintinrent tout de même leur décision.

Durant les heures qui suivirent, six Israéliens reçurent des greffes d’organes qui leur sauvèrent la vie : quatre d’entre eux étaient juifs. Le Premier ministre de l’époque Ehoud Olmert téléphona au Khatib pour les remercier de leur « geste noble ». « Répondre à la violence par la violence ne sert à rien » avait alors déclaré Abla Khatib. Et d’ajouter : « Peut-être que cette histoire parviendra aux oreilles du monde pour que les gens apprennent à faire la distinction entre ce qui est juste et ce qui ne l’est pas. Peut-être que les Israéliens changeront d’opinion sur nous. »

7. Le héros d’origine malienne de l’Hyper Cacher

9 janvier 2015. Un terroriste fait irruption dans l’Hypercacher de Vincennes et tire de sang-froid sur les clients juifs venus faire leurs emplettes en l’honneur du Chabbat. Bilan du carnage : 4 morts et plusieurs blessés. Mais sans l’intervention de Lassana Bathily, un manutentionnaire musulman de 24 ans, le bilan aurait pu être bien plus lourd.

Alertant les clients de l’existence d’une chambre froide à l’étage inférieur, Bathily y a caché plusieurs d’entre eux, a éteint les lumières puis leur a recommandé de rester calmes. Il est ensuite remonté au magasin pour chercher de l’aide. Bien qu’initialement suspecté par la police d’être lui-même un terroriste, Bathily a réussi à fournir des explications précises aux policiers pour leur permettre d’intervenir. Ses informations ont permis aux agents du RAID de donner l’assaut puis de liquider le terroriste.

Après une pétition lancée à l’échelle nationale pour qu’on lui accorde la nationalité française, l’employé d’origine malienne a finalement été naturalisé le 20 janvier 2015 puis décoré de la légion d’honneur. Interrogé au micro d’une chaîne de télévision, il avait expliqué son geste : « On est tous des frères… Ce n’est pas une question de juifs, de chrétiens ou de musulmans, on est tous dans le même bateau. »

8. À la rescousse des réfugiés syriens

Alors que les combats en Syrie n’en finissent pas de causer la mort et le déplacement de populations, un certain pays vient en aide à des milliers de civils syriens, sans toutefois s’attirer la moindre attention ni reconnaissance. Les hôpitaux israéliens soignent sans fanfare des Syriens qui, de retour dans leur pays, se gardent bien de révéler le fait qu’ils ont été hospitalisés dans l’État juif.

L’Hôpital Rebecca Sief de Safed ou l’Hôpital de Gallilée occidentale de Nayaria – tous deux situés au nord d’Israël – estiment à plusieurs centaines le nombre de Syriens qu’ils soignent annuellement, des patients en danger de mort conduits en Israël par des factions luttant contre le dirigeant syrien Bachar Assad. Un tiers du coût des soins médicaux apportés aux réfugiés syriens est pris en charge par le ministère israélien de la Défense, un tiers par le ministère de la Santé, et le reste est couvert par des hôpitaux privés. Quand les patients syriens retournent au pays après leur séjour en milieu hospitalier israélien, le corps médical israélien enlève toutes les inscriptions hébraïques de leurs flacons de médicaments et leur équipement médical, cela afin que leur entourage ne remarque pas qu’ils se sont rendus en Israël, un pays considéré par beaucoup comme ennemi.

 Les Israéliens prennent les mêmes précautions quand ils apportent de l’aide humanitaire aux Syriens ou aux réfugiés syriens. En 2014, un consortium israélien d’organismes d’aide humanitaire a collecté 20 000 articles, notamment des vestes, des couvertures et des sacs de couchage, de la part d’Israéliens qui souhaitaient venir en aide aux réfugiés syriens. Avant de faire partir le convoi, les Israéliens a reçu l’instruction d’enlever toutes les étiquettes israéliennes et les inscriptions hébraïques des objets donnés.

9. Un « Schindler juif »

Le philanthrope juif canadien Yank Barry fut autrefois connu comme étant le chanteur principal du groupe The Kingsmen, dont le hit « Louie Louie » des années 1960 fait encore des émules. Plus récemment, Barry s’est illustré dans le domaine humanitaire en cofondant, avec son ami boxeur Mohammed Ali, la Global Village Champions Foundation, un organisme qui fournit des denrées alimentaires de première nécessité dans le monde entier.

Au cours des dernières années, Barry a œuvré pour secourir des réfugiés issus de Syrie et d’Irak – qu’ils soient musulmans, chrétiens ou yazidis – en les aidant à rejoindre la Bulgarie. Une fois sur place, Barry et son épouse Yvette les placent dans des hôtels à leurs frais et assurent leurs repas. Ils tiennent également à faire connaissance avec eux et s’impliquent personnellement dans leur intégration.

S’inspirant d’Oskar Schindler, l’homme d’affaire allemand qui sauva 1 218 Juifs pendant la Shoah en les employant comme main d’œuvre forcée dans son usine, Barry s’était fixé comme but de secourir ce même nombre de personnes du Moyen-Orient. Mais en septembre 2014, il a surpassé cet objectif, et il continue toujours à aider les réfugiés du Moyen-Orient, ainsi qu’à financer ceux ayant déjà rejoint l’Europe.

Évoquant les treize frères et sœurs de son grand-père Samuel qui ont péri à Auschwitz, Barry souhaiterait que le monde entier se mobilise pour cette cause, à l’image de ces non-Juifs qui s’efforcèrent de venir en aide aux Juifs pendant la Shoah. « Les gens seraient surpris de voir un homme juif venir en aide à des musulmans, remarque-t-il, mais lorsque je rencontre de telles personnes, j’ai l’impression que l’histoire se répète. Les ressemblances sont frappantes. Les Bulgares ont caché des Juifs pendant la guerre. Leur attitude fut très courageuse. Alors si vous aussi vous avez du cœur, vous devez absolument faire quelque chose pour cela. »

10. Dr Ahmed Eid et Dr El’hanan Fried, le duo de choc de l’Hôpital Hadassa

Le 11 octobre 2015, à Jérusalem, un enfant juif israélien de 13 ans se fait poignarder par deux adolescents palestiniens. Quand il est transporté d’urgence à l’Hôpital Hadassa, sa vie ne tient plus qu’à un fil. Arrivé à Hadassa, il est aussitôt pris en charge par deux membres du personnel médical dont le dévouement contribue grandement à l’excellente réputation du centre hospitalier : Dr Ahmed Eid, un arabe israélien musulman de 65 ans qui est directeur du département de chirurgie, et Dr El’hanan Fried, un juif orthodoxe de 41 ans, qui est à la tête de l’unité des soins intensifs d’Hadassa.

Quand le jeune adolescent est conduit aux urgences, son état est critique : « Pas de pression sanguine. Un pouls à 40. Ventilation sur scène » se souvient Eid qui s’empresse de commencer l’opération. Il est assisté par Dr Fried qui décrit le patient comme étant « plus mort que vivant ».

Après une intervention chirurgicale effectuée en collaboration avec une équipe de spécialistes aussi bien juifs, musulmans, chrétiens, religieux, laïques et orthodoxes, l’état du jeune garçon est enfin stabilisé et Dr Eid se rend dans la salle d’attente pour s’entretenir avec le père du patient. Entre temps, il avait été informé du sort des deux assaillants : Hassan Manassia, 15 ans, avait été abattu par la police après avoir attaqué son patient ainsi qu’un autre passant juif de 21 ans. Quant à son cousin de 13 ans, Ahmed Manassia, il avait été blessé par balles et était actuellement soigné à l’Hôpital Hadassa du Mont Scopus.

En entrant dans la salle d’attente pour rencontrer le père de la jeune victime, Dr Eid remarque qu’il s’agit d’un juif orthodoxe : « Je m’appelle Ahmed Eid et je suis directeur du département de chirurgie. Écoutez, votre fils est encore en vie. Il va s’en sortir » déclare-t-il. Et d’ajouter sur une note d’humour : « C’est un Ahmed qui a poignardé votre fils, et c’est un Ahmed qui va lui sauver la vie. »

À noter que la victime comme son assaillant – tous deux soignés par des médicales de confessions différentes – se sont entièrement rétablis.

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