Réflexions

Miracles divins, miracles humains

16/12/2014 | par rabbin Benjamin Blech

Le monde entier reconnait les miracles accomplis par Dieu. Nous autres Juifs, nous saluons également les miracles accomplis par l’homme !

Nous Juifs croyons sans aucun doute aux miracles. Nous avons même des fêtes pour les commémorer.

Hanouka est l’une d’entre elles. L’autre est Pourim. Durant ces deux fêtes, nous récitons une prière appelée Al Hanissim dans laquelle nous remercions Dieu de nous avoir accordé le privilège d’en être témoins. Durant ces deux fêtes, nous faisons une bénédiction particulière destinée à exprimer notre gratitude à l’égard de « l’Éternel notre Dieu qui a accompli des miracles pour nos ancêtres à pareille époque en ces mêmes jours. »

Visiblement, les miracles ne doivent pas être tenus pour acquis. La réaction religieuse exige une expression verbale de notre gratitude à leur égard. Et pourtant, il y a quelque chose de surprenant dans le fait que ce soit seulement lors de les fêtes non-bibliques et relativement tardives de Hanouka et Pourim qu’un accent particulier est mis sur les miracles.

Avec les multiples miracles qui jalonnèrent le récit de l’Exode, la fête de Pâques aurait certainement mérité la mention d’un Al Hanissim. Les dix plaies, le partage de la mer rouge pour les Israélites, la noyade consécutive des Égyptiens sur ce qui, quelques instants auparavant, avait été de la terre ferme – c’étaient là autant d’événements remarquables qui témoignaient indubitablement d’une intervention divine miraculeuse. Et pourtant, la formulation liturgique attestant des miracles ne fait aucune apparition durant cette fête. De même, nous n’y récitions pas la bénédiction qui met en relief les miracles.

Il en va de même pour la fête de Chavouot, quand les enfants d’Israël se tinrent sous le mont Sinaï suspendu sous leurs têtes et quand non seulement ils entendirent, mais aussi ils virent miraculeusement les paroles de Dieu alors qu’ils recevaient les dix commandements. Durant cette fête, non plus, nous ne récitons pas Al Hanissim. Ni d’ailleurs durant celle de Souccot, qui commémore la survivance des Juifs durant leurs 40 ans de pérégrinations dans le désert, subsistant uniquement sur de l’eau et de la nourriture prodiguées miraculeusement et protégés par les nuées de gloire divines.

Pourquoi reconnaissons-nous les miracles de Hanouka et Pourim d’une façon différente que les miracles bibliques ?

La réponse touche au cœur d’une distinction remarquable que le judaïsme a opérée entre deux sortes de miracles. Le monde entier saluer les miracles surnaturels accomplis par Dieu ; les Juifs, eux, acclament également les miracles résultant d’efforts surhumains de la part de l’homme. Dieu n’est pas le seul à être capable d’accomplissements inimaginables, accomplissements que seul le terme miracle suffirait à décrire. Ses créatures peuvent, à leur tour, s’élever à d’inconcevables niveaux de noblesse, de perfection morale et de réalisation spirituelle – et lorsqu’ils y parviennent, c’est là un miracle qui, dans un certain sens, pourrait l’emporter sur les miracles d’origine divine.

Dans un certain sens, lorsque Dieu fait quelque chose pour outrepasser les lois de la nature, cela n’exige aucun effort de Sa part. Car Dieu peut tout. Dans le récit de Pâques, bien que les eaux du Nil fussent habituellement pures et potables, Dieu put aisément les transformer en sang et les rendre imbuvables. La première plaie, tout comme le suivantes, ne posèrent pas de réel défi au Tout-Puissant. Et tout comme Dieu sépare en temps normal l’eau de la terre ferme, il put aisément modifier son cours, comme il le fit pour les Israélites et pour les Égyptiens dans la mer rouge. Les œuvres de Dieu s’appréhendent comme de simples manifestations de son pouvoir. Ce que Dieu accomplit pourrait passer à nos yeux comme des miracles, mais pour Lui, ce fut chose facile. Ce sont donc davantage les miracles de l’homme qui méritent à juste titre tout notre estime et notre admiration.

Et ce sont ces miracles accomplis par l’homme qui sont à l’origine de l’accent mis sur les miracles durant les fêtes de Hanouka et Pourim. Car ils parlent de moments historiques durant lesquelles certaines personnes relevèrent le défi d’exploiter pleinement leurs capacités, d’accéder à des degrés spirituels qui dépassent l’attendu, d’êtres humains qui façonnèrent de véritables miracles parce qu’ils mirent à profit leurs dons de courage, de foi et de sagesse conférés par Dieu.

Notre rôle sur terre n’est pas de se contenter de prier Dieu pour qu’il fasse un miracle, mais bien d’incarner un miracle.

Le caractère unique livre de la Bible qui relate le récit de Pourim tient au fait que le nom de Dieu n’y est mentionné à aucune reprise. Dieu reste caché. C’est Esther, qui a donné son nom au livre, et son oncle Mardochée qui jouèrent les rôles cruciaux. Ils comprirent que notre rôle sur terre n’est pas de se contenter de prier Dieu pour qu’il fasse un miracle, mais bien d’incarner un miracle. Face au péril de la première tentative de génocide consignée, et sous la menace d’Aman, ils réagirent en héros. Et les héros sont des miracles. Ils prouvent que nous avons la capacité de suivre les traces de Dieu et d’accomplir de véritables miracles.

Hanouka, de même, est l’histoire d’un accomplissement humain héroïque. Ceux furent les Maccabées, une petite famille pétrie d’un idéalisme spirituel profond, qui eurent le courage de lutter contre un empire. Ce fut le combat du petit nombre contre la multitude – mais ce fut aussi le combat du pur contre l’impur. La raison n’aurait pas accordé aux Hasmonéens la moindre petite chance de triompher. Seule la foi, la foi en leur capacité d’atteindre l’impossible en tant que serviteurs de Dieu, qui leur donna la possibilité de devenir les agents divins d’un miracle fort peu probable.

Fait révélateur, le terme hébraïque renvoyant au miracle, ness, forme la racine du mot nissayon, qui signifie épreuve. C’est le même terme qui apparaît dans la Torah quand nous lisons que Dieu mit Abraham à l’épreuve. Le miracle n’est rien de moins qu’une mise à l’épreuve de notre potentiel divin. Et c’est précisément lorsque des êtres humains relèvent des défis divins avec brio que nous sommes témoins de ce qui mérite à juste titre d’être appelé un véritable miracle.

Des miracles d’hier aux miracles d’aujourd’hui

Demandez-moi si je crois en ces miracles d’aujourd’hui et je vous citerai sans hésitation de nombreuses illustrations.

Le peuple d’Israël, ces Macabées des temps modernes qui ont subi les tirs du Hamas durant l’été dernier et le terrorisme continu de ces derniers mois tout en maintenant leur foi et leur loyauté à la terre sainte – ils sont un miracle.

Les jeunes hommes qui servent dans l’armée israélienne – des Israéliens de naissance aussi bien que des volontaires du monde entier qui sont prêts à risquer leur vie pour protéger leur terre et leur nation – ils sont un miracle.

Les érudits et étudiants en Torah qui sont venus étudier à la synagogue où de saints rabbins furent brutalement tués à coups de hache dès le lendemain du crime – ils sont un miracle.

Les Juifs qui, malgré la résurgence d’un antisémitisme sans pareil depuis la Shoah luttent contre un monde saturé de déformations médiatiques, d’hypocrisies onusiennes et de haine des Juifs flagrantes dans des pays se targuant de leurs principes libéraux et démocratiques – ils sont un miracle.

Ce Hanouka, nous témoignerons notre gratitude pour ces miracles qui furent amorcés par l’homme. Ils gagnent notre admiration parce qu’ils nous rappellent du plus grand de tous les miracles, celui que, pour reprendre les mots du roi David, « Tu [l']as fait de peu inférieur à Dieu, et couronné de gloire et de magnificence. » (Psaumes : 8:5)

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