Société

John Galliano, écoutez ma voix !

06/11/2014 | par Slovie Jungreis-Wolff

Le grand couturier, congédié par la maison Dior pour ses propos antisémites, vient de perdre son procès pour licenciement abusif.

En Mars 2011, John Galliano, l’extravagant couturier de Dior, est filmé par un smart phone en train de tenir des propos antisémites à des clients attablés dans un bar situé dans le quartier juif de Paris. Cette conduite est vigoureusement dénoncée par Dior qui le relève de ses fonctions.

En Septembre 2011, il est reconnu coupable d’insultes antisémites proférées en public à deux reprises. En droit français, cela constitue une infraction ; le tribunal accepte son plaidoyer qui s’appuie sur son état d’ébriété. Il présente ses excuses pour son comportement et est condamné à des amendes au lieu de six mois de prison. Après deux ans de silence, Galliano s’explique dans les colonnes de Vanity Fair : « Ces propos sont les pires que j’ai tenus dans ma vie, mais je ne voulais pas le faire. J’ai essayé de savoir pourquoi ma colère était dirigée contre ce peuple. Je réalise maintenant que j’étais tellement en colère et si mécontent de moi-même que j’ai dit la chose la plus méchante que je pouvais. »

Le célèbre couturier a travaillé pour Dior durant près de 15 ans. Après avoir été remercié, il poursuit la maison pour licenciement abusif, et demande entre 3 millions et 16 millions de dollars de dommages et intérêts. Cette semaine, le couturier britannique a été débouté et condamné à verser un euro symbolique à la maison Dior ainsi qu’à sa propre marque « John Galliano ». Son avocat veut faire appel.

Il est instructif de regarder la vidéo l’incriminant. Vous verrez un homme ivre ricaner et déclarer : « J’aime Hitler. Des gens comme vous devraient être morts. Vos ancêtres auraient du être gazés ! »

Je ne connaissais pas les explications de Galliano concernant ses propos haineux « dirigés contre ce peuple. » En fait, cela n’a pas vraiment d'importance. De telles déclarations ne peuvent être justifiées. L'ivresse ne peut jamais constituer une excuse à la haine. Nous ne pouvons pas rationaliser l'antisémitisme ; ni aujourd'hui ni jamais.

Il ya une déclaration, cependant, avec laquelle je suis d'accord. Logiquement, je ne devrais pas être de ce monde. John Galliano a raison. Mon père, ma mère et mes grands-parents auraient dû tous être gazés. Ils marchaient dans la vallée de la mort. Mais alors que l'épaisse fumée des fours crématoires noircissait le ciel rempli de l’odeur de la mort, mes parents et mes grands-parents ont triomphé. Ils ont survécu. Je suis née sur les cendres de l'holocauste.

John Galliano, trop nombreux sont ceux partagent vos sentiments d’homme ivre et qui vivent avec une haine tenace dans leurs cœurs. Ils crachent leur venin et crient que nous aurions dû périr dans des fours crématoires. Ils justifient la terreur et le meurtre d’innocents. Ils promettent de nous jeter à la mer.

Ils marchaient vers la mort en prononçant le Chema Israël. Aujourd'hui, nous prononçons le Chema pour eux.

Je m’adresse à vous tous. Et je m’adresse aussi à mes frères et mes sœurs. Je prends la parole pour tous ceux qui ne le peuvent plus. Nous pleurons pour nos cousins, pour nos oncles et pour nos tantes, et pour tous les beaux bébés qui étaient portés par nos Bubbies et zaydies (grands-parents en yiddish). Ils marchaient à la mort en prononçant le Chema Israël. Aujourd'hui, nous le prononçons pour eux. Nous portons leurs noms et vivons de telle sorte que leur mémoire ne soit jamais oubliée. Nous ne resterons pas silencieux. Car leur sang crie de la terre.

Notre Temple a été détruit. Nous avons été exilés de notre terre pendant deux mille ans. Nous avons souffert de pogroms, de croisades, d’inquisition, de persécution et de Shoah. Nous avons marché pâles comme la mort, désolés, témoins d’une véritable descente aux enfers, dans les abîmes du mal. Mais nous avons gardé la vie une fois de plus et nous sommes ici. Am Yisrael ‘Haï – la nation juive vit. L’espoir bat dans nos cœurs, l'étincelle brille dans nos âmes.

Quand mon fils est né, mon père nous a raconté l'histoire de son neveu, fils de son frère, qui s’appelait Akiva. Déporté juste avant sa Bar Mitzvah, mon père ne le revit jamais. Il perdit non seulement son cher neveu, mais aussi ses parents, ses grands-parents, ses frères et sœurs, ses neveux et nièces, ses cousins ​​et cousines. Un monde entier était en flammes. Nous avons appelé notre enfant Akiva et ajouté le nom Haïm – pour la vie.

Le jour de sa Bar Mitzvah, mon fils se tenait devant une salle remplie par notre famille et nos amis. Il parla de son cousin Akiva, avec qui il partageait le nom. Il n’avait jamais connu ce jeune garçon mais sa présence planait au-dessus de nous depuis le jour où il était venu au monde.

« Je dédie ma Bar Mitzvah à la mémoire de mon cousin, Akiva Halevi Jungreis, décédé Al Kiddouch Hachem, en sanctifiant le nom de D.ieu. Et aux milliers de garçons Bar Mitzvah dont la voix de Torah a été étouffée dans leur enfance. » Puis mon fils a conclu : « Ils étaient plus légers que les aigles et plus forts que les lions à accomplir la volonté de leur Créateur ».

Nos fils et nos filles sont les garants de la vitalité du judaïsme et du peuple juif. Ils étudient notre sainte Torah, allument les lumières de la Menora, entonnent les chants de Chabbat et emplissent les salles d'étude avec les lettres de l'Aleph-Beth. Émergeant d'un peuple brisé dans son corps et son esprit, nous avons obtenu le privilège de reconstruire. Chaque enfant juif est notre façon de dire à tous les John Galliano que nous sommes attachés à notre confiance en D.ieu. Cette confiance dans la promesse que D.ieu, malgré l'obscurité, ne nous a jamais abandonné. Et ne nous abandonnera jamais.

Related Articles

Donnez du pouvoir à votre voyage juif

Inscrivez-vous à l'e-mail hebdomadaire d'Aish.com

Error: Contact form not found.

linkedin facebook pinterest youtube rss twitter instagram facebook-blank rss-blank linkedin-blank pinterest youtube twitter instagram