Société

La fête des Mères, 365 jours sur 365!

29/05/2016 | par Sara Debbie Gutfreund

Alors que les enfants écument carteries et parfumeries pour fêter leur maman, j’ai envie de leur dire : le plus beau cadeau est celui que vous m'offrez au quotidien...

« Puis-je vous poser une question personnelle? » me lança récemment un ambitieux avocat fortuné, lors d'un dîner organisé chez ma mère.

« Vous venez de le faire » ai-je répondu en souriant tout en tentant de m’éloigner. Je devinais déjà la suite de notre discussion. Cette sempiternelle question finissait toujours par arriver dans mes conversations les plus anodines.

Ignorant ma tentative d’esquive, mon interlocuteur poursuivit son propos : « Pourquoi ne commencez-vous pas à travailler à plein temps ? Vu votre parcours universitaire et votre talent, c'est un véritable gâchis de rester à la maison. »

Je sentis mes épaules se contracter sous la colère qui montait en moi. Je savais que cette question allait arriver dans cette salle à manger pleine de juges et d'avocats, dans laquelle j'y étais le seul écrivain et la seule mère travaillant à domicile. Mais étant habituée à ce genre de saillies, j'avais mes réponses toutes prêtes. Comment j’avais réussi à boucler ma maîtrise en thérapie familiale tout en donnant naissance et en élevant trois enfants de moins de trois ans. Comment j’ai pu travailler à temps partiel en tant que psychologue. Comment je suis parvenue à animer des groupes de discussions parentaux et des ateliers d'estime de soi, tout en publiant de nombreux ouvrages. Comment il a été prouvé dans toutes les études que les enfants ont besoin l'amour et de l'attention de leur mère, que leur développement en dépend et que le dévouement maternel leur est indispensable pour prospérer.

« Je reste à la maison pour m’occuper de mes enfants par pur égoïsme ! »

Et pourtant, je n'ai rien dit tout cela parce que je savais qu'il visait l'une de mes failles : il y avait toujours une partie de moi qui recherchait la carrière et de la reconnaissance sociale. J'ai donc décidé d'être honnête.

« Je vais vous faire une confidence, lui ai-je dit. Si je reste à la maison pour m’occuper de mes enfants, c’est par pur égoïsme ! »

J'ai laissé ma petite bombe faire son effet pendant quelques secondes avant de m’expliquer :

« Je pourrais tout à fait monter dans le RER de 7h du matin et engager une nounou à plein temps. Mais si je le faisais, c'est elle qui réveillerait chacun de mes enfants et leur servirait le petit déjeuner. C’est elle qui découvrirait leurs sourires endormis et les écouterait raconter leurs rêves. C’est elle qui les regarderait gravir les marches du car de ramassage scolaire. Or je veux faire cela moi-même, parce que c’est mon plaisir. Par pur égoïsme ! Je sais bien que je pourrais trouver une excellente nounou pour mon bébé. Mais c'est elle qui verrait le premier sourire de mon ange et applaudirait ses premiers pas. C'est elle qui consolerait ses pleurs suite à un mal d'oreille ou à un rêve effrayant. C'est encore elle qui le bercerait et le réconforterait. Je suis égoïste. Je veux que ce soit moi qui le fasse. Et personne d’autre ! »

Je n'étais pas sûre que Mr Avocat Riche et Ambitieux comprenne ce que je voulais dire, mais j’ai tout de même continué :

« Je suis sûre que mes enfants se porteraient bien si c'était une baby-sitter qui ouvrait la porte à leur retour de l’école. Les enfants savent prendre les choses comme elles viennent. Et ils grandiront, que je sois ou non à leurs côtés. Ce ne sont pas tant mes enfants qui manqueraient quelque chose si je ne pouvais pas leur lire une histoire ni réciter le Chema avec eux avant d'aller dormir. C'est surtout moi qui manquerais tout. Or je suis quelqu’un d’affreusement égoïste. Je veux être celle qui leur sert un repas chaud et les écoute me raconter leur journée. Et quand ils auront grandi, je saurai que j'ai passé toutes ces précieuses années avec eux. Le boulot, on peut toujours le rattraper. Le temps, non ! »

Mon interlocuteur resta assis, silencieux, pendant une demi-minute, comme s'il réfléchissait longuement à ma réponse. « Ça alors ! Vos bout ‘choux en ont de la chance ! Je n'ai jamais entendu cela de toute ma vie. Ça doit être cela le secret du bonheur ! Vous devriez vraiment écrire un papier à ce sujet ! »

« Merci pour l’idée… Je le ferai peut-être un jour » ai-je répondu.

Cette conversation m'est revenue à l'esprit en cette veille de fête des Mères, et je me suis mise à penser à tous ces « cadeaux » dont nos enfants nous comblent au quotidien et pour lesquels je leur suis éternellement reconnaissante.

Je pense tout d’abord à la magie de leurs jeux et au don qu’ils ont d’apprécier les bonheurs simples de la vie. Que ce soit en faisant de la peinture au doigt dans la cuisine ou en courant sur un terrain de football. En escaladant un terrain de jeu ou en dévalant une montagne russe. Lors d'une randonnée à travers la forêt quand s'épanouissent les fleurs au printemps, les enfants savent remarquer les petites choses que nous oublions trop souvent. L'arc-en-ciel dans une flaque. Le papillon sur le journal. La façon dont on sent le vent quand on court ensemble sur l'herbe. La liberté de regarder notre cerf-volant prendre son envol et toucher le ciel…

Je pense aussi au cadeau qu’ils nous font en nous confiant leurs histoires. Peu importe si parfois, elles n'ont ni queue ni tête. Si parfois, elles ne semblent pas avoir pas de fin et qu’ils les ponctuent de pauses aléatoires pour garantir l’effet suspense. Mais si vous prenez le temps d'écouter, vous allez apprendre quelques leçons incroyables. Quant à la façon dont le monde est perçu d'un point de vue innocent, pas encore blasé. Comment l'imagination peut surmonter autant d'obstacles qui bloquent souvent notre propre vision des choses. Et comment parfois une histoire n'a pas besoin de fin définie. Parfois, c'est le récit lui-même qui nous saisit, nous édifie et nous aide à entrevoir de nouvelles possibilités.

Je pense aussi à la force du don qu’ils nous permettent de découvrir en nous. En effet, les enfants sont dépendants de nous comme personne d'autre ne le sera jamais. Ils ont besoin de nourriture, de vêtements et d'un abri. Ils ont besoin d'amour, de conseil et de chaleur. Mais bien au-delà ce qu'ils ont besoin de recevoir, nous devons et nous voulons leur donner. La capacité de donner est une source qui abonde chaque fois que nous l’utilisons. C'est une bénédiction qui nous transforme. Elle nous pousse au-delà de nos définitions étroites de nous-mêmes et augmente le potentiel de nos capacités.

Et je pense enfin au bonheur de les voir grandir. Les enfants incarnent l'espoir lui-même. Du délicieux arome du nouveau-né jusqu'aux nombreuses « premières fois » que chaque enfant traverse, élever un enfant est un parcours constant de débuts prometteurs. La première dent. Le premier pas. Le premier jour d'école. La première fois qu'il sait faire du vélo. La première fois qu'il conduit une voiture. Son premier chidoukh. La liste est sans fin. En tant que parents, nous ne sommes pas seulement témoins de sa croissance, nous sommes aussi partenaires de chaque nouvelle étape. Et cela nous fait nous-mêmes grandir d'une façon que nous n'aurions jamais pu imaginer avant d'avoir été bénis d'enfants.

En tant que mamans comblées, nous devrions peut-être aborder la fête des Mères sous un angle inversé. Non pas simplement comme le jour où nos rejetons vont écumer carteries, parfumeries et bijouteries pour dénicher LE cadeau idéal pour marquer leur reconnaissance. Mais aussi, et surtout, le jour qui nous permet à nous autres mères, d’apprécier ces cadeaux que nos enfants nous ont d’ores et déjà offerts. Ces  inestimables présents que je conserve, parmi tant d'autres, près de mon cœur.

Et quand j’observe mes enfants pendant leur sommeil, un petit morceau de clair de lune tombant sur le plancher de leur chambre, je leur chuchote en secret : « Comme j’aime être votre maman ! Merci pour le cadeau de votre présence dans ma vie. C’est ma bénédiction à moi et elle est bien trop précieuse pour que je la partage. »

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