Société

Et l'Oscar du meilleur second rôle revient à...

06/03/2014 | par rabbin Benjamin Blech

Dans la vie, comme aux Oscars, nul besoin d'occuper le premier rôle pour briller!

C'est LA soirée de la planète Hollywood !

La 86ème cérémonie des Oscars vient tout juste d'avoir lieu. Des millions de personnes dans le monde entier sont restées scotchées pendant des heures devant leur télévision pour découvrir les heureux lauréats de ces prestigieuses et convoitées récompenses cinématographiques. A l'origine, les Oscars récompensaient seulement les meilleurs acteurs et actrices de l'année. Mais depuis une dizaine d'années, la prestigieuse académie cinématographique a décidé d'ajouter une récompense au palmarès : celle du meilleur(e) acteur/actrice dans un second rôle.

Cette initiative est porteuse d'un message qui ne doit pas nous laisser indifférent.

La maturité, c'est bien connu, est le moment où nous apprenons à concilier nos rêves grandioses avec nos limites réalistes. En grandissant, j'ai dû lentement faire évoluer une partie de mes souhaits les plus fous nés de mon imagination débridée pour les rapprocher de la plus sobre réalité. De mon culte enfantin de stars du football et de gagnants d'or olympique, j'ai dû finalement reconnaître que je ne serai jamais un Zidane ou un David Douillet. Et comme j'ai ensuite plutôt choisi mes héros parmi les grandes figures rabbiniques des mondes spirituels que dans le monde physique de l'athlétisme, je dus là encore affronter la navrante vérité qui pointait que je n'étais tout simplement pas au niveau du Rav Soloveitchik et du Rabbi de Loubavitch par exemple, loin s'en faut.

Peut-être puis-je recevoir l'Oscar divin, saluant mes talents dans un rôle de soutien d'une personne plus parfaite que moi, mais qui serait à sa manière toute aussi importante.

Certes, j'ai le droit d'aspirer à leur ressembler. Mais l'âge aidant, j'ai dû reconnaitre que je ne pouvais pas sérieusement envisager d'atteindre leur perfection ultime. Ils sont tout simplement bien meilleurs que je ne le suis ! Pour autant, et tout en étant conscient de cette obligatoire humilité, je me dois de remplir la mission pour laquelle Dieu m'a envoyé ici sur la Terre. Et ce dussé-je ne pas décrocher le rôle principal ! Je peux selon toute vraisemblance recevoir l'Oscar divin, saluant mes talents dans un rôle de soutien d'une personne plus parfaite que moi, second rôle qui serait à sa manière tout aussi important que le rôle principal.

Le second rôle de Mordekhaï

L'histoire juive est truffée de récits mettant en valeur des héros de premier plan, soutenus par des protagonistes a priori secondaires mais jouant un rôle majeur dans la réalisation des plans divins. Le récit hagiographe évoquant le miracle de Pourim est nommé sur la Reine Esther (Meguilat Esther). C'est elle qui demande au Roi Assuérus d'épargner le peuple juif. C'est elle encore qui ose se présenter devant le souverain perse sans y avoir été invitée, alors même que cette initiative aurait très bien pu la faire condamner à mort. C'est elle enfin qui exige la pendaison d'Haman et le droit pour les Juifs de se défendre contre la menace de génocide imminente.

Pourtant, rien de tout cela n'aurait pu se dérouler sans les conseils, le courage et la sagesse de son oncle Mordekhaï qui était relégué dans les coulisses du palais royal.

Esther a donné son prénom à la Méguila. Apparemment, Mordekhaï ne semble avoir qu'un rôle secondaire. Mais sans lui, il est clair qu'il n'y aurait eu aucun miracle de Pourim.

La tradition juive affirme clairement qu'aucun être humain n'a égalé la grandeur de Moïse. C'est même le thème de l'un des 13 articles de foi codifiés par Maimonide : « Aucun prophète ne s’est levé comme Moise », c'est-à-dire qu'il n’y a pas eu d’autre homme qui ait parlé "face à face" avec Hachem. Moïse a tenu le rôle principal dans la libération des Juifs d'Egypte, dans la réception de la Thora divine sur le Mont Sinaï, et dans la direction du peuple juif pendant son exil de 40 ans dans le désert avant qu'il n'atteigne la Terre promise.

Et pourtant, il n'aurait rien pu faire seul. Les Juifs avaient tout autant besoin de son frère Aaron. Aaron qui aimait la paix et la recherchait. Aaron qui était "l'élu du peuple" parfaitement adapté aux fonctions publiques du Grand Prêtre. Quand Aaron est décédé, le peuple entier a porté son deuil pendant 30 jours. Tout autant que son frère Moïse, Aaron a mérité l'Oscar divin dans sa formidable interprétation d'un second rôle.

Il y a des tas d'exemples de seconds rôles dans la Bible ! Les actions de chaque protagoniste y comptent de manière significative. Certes, l'un d'entre eux se voit parfois mis en avant par rapport aux autres. Il devient alors un symbole qui reste vivace jusqu'à nos jours.

Votre rôle principal

Dans un commentaire audacieux sur l'histoire de la création, le Talmud de Jérusalem nous dit que « Dieu créa l'homme afin qu'il soit Son partenaire dans l'acte de la Création ». Dieu a volontairement laissé le monde inachevé, afin que l'humanité puisse jouer un rôle dans son achèvement, sa perfection.

Chacun de nous a un (second) rôle crucial dans le script divin.

L'histoire de la vie elle-même met bien entendu en avant le Tout-Puissant, mais elle assigne aussi à chacun de nous un second rôle très précis et crucial. Nous avons tous une tâche assignée dans le projet divin, par laquelle nous rapprocherons le monde de sa perfection. Aucun d'entre nous n'aurait été inscrit dans le script céleste de l'existence humaine si nous n'avions pas de but précis à remplir.

Notre mission sur Terre est justement de découvrir quel est notre rôle, et peu importe l'importance qu'il revêt dans le "film" général divin. En tant que parent, ami, collègue ou salarie dévoué, en tant que simple individu qui peut améliorer le quotidien d'autrui ou qui peut être source de bienfaits pour sa communauté, chacun d'entre nous doit découvrir la raison pour laquelle Dieu a "ressenti le besoin" de le créer.

Et quand nous campons notre (second) rôle au mieux de nos capacités, nous devons nous réjouir en sachant que nous sommes en lice pour recevoir l'Oscar le plus prestigieux, celui décerné par Dieu lui-même.

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