Ce Qu'en Dit Une Mère Juive

Les Foodies

19/06/2011 | par Emouna Braverman

Vivre pour manger ou manger pour vivre?

« Gavés ». C’est le titre de l’article de B.R. Myers dans le magazine américain « Atlantic ». Une attaque assez grossière sur ceux qui se font appeler les « Foodies »   (Accros à la bouffe), et qui construisent leur vie et leur manière de voir les choses autour de manger, ce qu'il font souvent excessivement. 

Le Rabbin Weinberg demandait souvent : « Est-ce que vous vivez pour manger, ou est-ce que vous mangez pour vivre ? » 

Quelle que soit notre état, nous savons la réponse. On mange pour vivre. La nourriture est un moyen, pas une fin. 

Non qu’elle doive être mauvaise ou mal présentée - le Tout-Puissant nous a donné un monde d’abondance, et nous devons en profiter. Mais en profiter en ayant une ligne directrice, en ayant de la discipline, de la profondeur. 

Pour Shabbat et pour les fêtes, les plats doivent être exceptionnels. Nous voulons réellement que notre corps frissonne de plaisir. Mais cela uniquement parce qu’il y a un but, le but de savourer le jour de fête et de rendre grâce à notre Créateur. En tout cas il ne s’agit jamais de profiter des plats seulement. 

Nous ne devons jamais perdre de vue que les aliments sont là pour nous sustenter et nous fournir les forces nécessaires à la poursuite d’entreprises importantes qui contribueront à nous rapprocher du Tout-Puissant. Notre ancêtre Abraham avait la passion de convier les étrangers à sa table et de leur servir des mets. Il profitait de cette occasion pour leur enseigner à reconnaître la source de ces bienfaits par une bénédiction. Jamais les aliments n’étaient en eux-mêmes le but. 

Les émissions de cuisine sont très populaires de nos jours. Même les enfants rêvent de devenir des chefs célèbres. Et il faut reconnaître que par comparaison avec d’autres programmes, les émissions de cuisine semblent très inoffensives. Si n’était qu’elles pérennisent le culte de manger (ou devrais-je dire de se gaver !) en mettant au défi d’avaler des aliments de plus en plus écœurants.

L’article dans le magazine Atlantic décrit ce qu’on doit appeler des orgies culinaires : plus il y en a et plus ils sont contents. Au-delà des conséquences physiques néfastes de la gloutonnerie, nous avons aussi l’obligation morale de ne pas nous laisser aller à trop manger, de ne pas laisser notre corps décider pour nous, de ne pas étaler sans vergogne nos envies. 

Les « Foodies » du monde entier ont transformé l’univers de la nourriture – sa production, sa préparation et sa consommation – en une véritable manière de vivre, une religion. Ils sont sans cesse à la recherche d’une nouvelle expérience culinaire (quelqu’un va-t-il inventer la gastronomie moléculaire ?), d’un nouveau goût, du plat parfait… 

Tant de temps passé à  satisfaire un besoin physiologique simple ! On nous enseigne pourtant que la Torah s’acquiert en consommant du pain et de l’eau, et que trop de laisser-aller nous détourne de notre but et nous égare. 

Cartes sur table : c’est vrai, j’anime un site de recettes de cuisine. Mais je veux croire (j’espère?), qu’il répond à l’objectif d’inspirer de somptueux repas pour notre famille, particulièrement pour le Shabbat et  les Fêtes, repas qui vont sublimer les instants et élever les âmes, et non pas l’inverse. Je sais qu’on me fera savoir si j’ai dépassé les bornes ! 

Nous n’avons pas besoin du gâteau au chocolat parfait, même si certains font le tour du pays à sa recherche. Je me passerai du steak-frites parfait ou du carpaccio parfait ou du Tiramisu parfait (en fait, peut-être pas du Tiramisu). Et je n’en ferais certainement pas le projet d’une vie ! 

J’avoue : j’aime cuisiner. J’aime manger. J’aime essayer de nouvelles recettes et bien les présenter. Mais je ne veux pas passer ma vie à en parler, ni devenir obsédée par ça. (Qui a le temps ?). 

Tout compte fait, ce qui me dérange à propos de ces « Foodies » tels qu’ils sont décrits dans l’article, ce n’est pas tant la perversion du but (vivre pour manger), que la grossièreté de leur approche, et l’étalage de leur corps. 

Avoir faim est un besoin physique légitime, et satisfaire sa faim en public est un comportement social acceptable. Il ne s’en suit pas que tout laisser-aller soit approprié. Les pulsions du corps doivent être dissimulées autant que possible, et assouvies avec discrétion, sans étalage. 

Profitez d’un bon plat, demandez en la recette, faites des compliments à votre hôte et remerciez-la – et puis passez à autre chose. Il y a tant à faire, tellement de besoins urgents à satisfaire dans le monde que nous vivons. Moi, je me contenterai de trouver le deuxième meilleur gâteau au chocolat du monde.

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