Roch Hachana

Ces âmes qui rayonnent quand l’esprit s’obscurcit

10/09/2012 | par Aish.fr

Mes patients atteints de la maladie d’Alzheimer m’ont appris à découvrir l’essence de notre véritable identité.

En ma qualité de coordinatrice des activités dans un centre de soins de jour pour personnes souffrant de troubles de la mémoire, je me demande souvent ce que j’ai appris en côtoyant des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.

Une première chose que j’ai découverte est que l’âme et l’esprit constituent deux entités distinctes. Il m’est arrivé de voir l’âme d’une personne rayonner en dépit d’un esprit lourdement embrumé. En fait, je l’ai constaté à tant de reprises que j’en suis venu à le guetter.

La toute première fois où j’ai remarqué la nature spirituelle d’une personne atteinte de troubles de la mémoire prendre le dessus fut durant une douloureuse expérience personnelle. Mon père venait récemment de rentrer de l’hôpital après une intervention cardiaque et il était extrêmement désorienté. C’était vendredi soir et plusieurs de nous autres, enfants, étions assis autour de la table, à la fois anxieux et soulagés de le voir nous revenir dans un état si fragile. Mon père n’était pas au meilleur de sa forme sur le plan cognitif. Il était incapable de se souvenir de qui était qui et n’arrêtait pas de nous confondre. Il exigeait de savoir où se trouvaient les autres enfants et pourquoi ils n’étaient pas encore rentrés. Ma sœur et moi avons fondu en larmes parce que tous ceux qu’il réclamait étaient déjà présents, en face de lui.

Ma mère s’efforçait de rassurer mon père en lui expliquant ce qui se passait mais cela ne faisait rien pour calmer son agitation. En désespoir de cause, il a fini par se lever non sans difficulté de son siège. Tandis qu’il tenait le verre de Kiddouch de sa main tremblante, le vin a commencé à se renverser. Nous nous sommes tenus en silence, le cœur en lambeaux face à sa faiblesse, mais tout autant face à sa force. Car d’une voix forte et emprunte d’émotion, il a récité la prière sur un ton mélodieux et sans omettre le moindre mot. Cet homme, qui en dépit de tous ses efforts, ne parvenait pas à reconnaître ses propres enfants, fut capable de louer D.ieu et de sanctifier le Sabbat.

J’ai constaté cela à maintes reprises au cours de ma carrière. L’autre jour, j’ai soulevé un débat moral devant mes patients : un homme roule en voiture par une nuit froide et orageuse. Il aperçoit trois auto-stoppeurs coincés sur le bas-côté. La première est la femme de ses rêves. Le deuxième est le docteur qui lui a une fois sauvé la vie. Le troisième est un vieil homme. Il n’a de place que pour deux personnes. Qui va-t-il laisser derrière lui ?

Un homme appelé Max, qui est à stade tellement avancé de la maladie d’Alzheimer qu’il est incapable de retrouver le chemin du retour vers sa maison bien que celle-ci se situe à deux pas du centre, a torpillé mon petit jeu. Sans même un coup d’œil sur les différentes options, il a répondu de tac-au-tac : « Je sortirais de ma voiture et je leur laisserais les clés ».

Parmi nos membres se trouve également une rescapée de l’Holocauste appelée Abby, qui a survécu à la guerre en étant cachée dans un orphelinat chrétien. Un beau matin, la dame assise à côté d’elle n’arrêtait pas de répéter : « Aidez moi, aidez moi, par pitié aidez-moi. »

Abby, qui ne reconnaît plus son fils unique, s’est penchée tout près de l’autre dame. « Qu’est-ce qui t’arrive, ma chérie ? » a-t-elle demandé. « As-tu peur ? Veux-tu rentrer à la maison ? Nous sommes tous dans le même bateau. Tu dois prendre les choses du bon côté et tâcher de ne pas t’attirer des ennuis. »

Puis Abby a saisi la cuillère de sa voisine de table et s’est mise à lui donner de la compote de pommes. J’ai observé la scène du coin de la pièce, comme je le fais souvent, admirant le comportement de ces vieillards au crépuscule de leur vie. Et je me suis dit que les paroles d’Abby décrivaient parfaitement le monde dans lequel nous vivons. Nous sommes tous dans le même bateau dans ce monde de chimères et de matérialisme, et nos âmes ne sont pas satisfaites de leur sort. Elles aimeraient rentrer à la maison, mais elles sont pourtant contraintes de vivre dans un univers remplie d’épreuves difficiles. La meilleure chose que nous puissions faire est d’aider les personnes en difficulté.

A Rosh Hashana Dieu voit vraiement qui nous sommes

Si j’ai tiré une leçon de mon travail avec les personnes souffrant de démence, c’est bien la suivante : travaillez sur votre personnalité et efforcez-vous d’améliorer votre caractère. Parce que quand la majeure partie de vos aptitudes intellectuelles ont disparu, le noyau qui demeure représente ce que nous sommes vraiment.

A Roch Hachana, nous nous tiendrons devant le Tout Puissant, qui durant toute l’année nous a observés en coin. Tous nos masques et nos déguisements, nos illusions et nos prétextes s’envoleront. Car D.ieu voit à travers toutes ces façades. Et tout ce qui restera sera ce que nous sommes vraiment – notre âme. Notre véritable identité transparaîtra, qu’importe le brouillard qui s’est abattu sur elle.

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