Société

Ces lunettes qui en ont fait une star du net

17/12/2013 | par Aharon Chetrit

Petit Noah refuse à tout prix de porter ses lunettes. Pour l’aider à surmonter son complexe, sa maman lui crée une page Facebook de soutien qui crée un véritable buzz... À quand la campagne pour les boudeurs d'épinards?!

Noah Fisher, un américain de 4 printemps, a très mal réagi quand ses parents lui ont mis ses premières lunettes. Pour l’aider à surmonter son complexe, sa maman, Lindsey, a donc décidé de créer un groupe de soutien sur Facebook : Glasses for Noah (Des lunettes pour Noah).

Et ça a tout l’air de marcher... Avec ses quelques 80,000 adhérents, le groupe a créé le buzz sur la Toile, et des dizaines de milliers d’internautes sont venus rassurer Noah et l’aider à passer ce difficile cap.

En guise de message de bienvenue, Lindsey avait posté : « Notre mignon petit Noah de 4 ans a du mal à accepter ses nouvelles lunettes. Postez des photos de vous avec vos lunettes pour montrer à mon fils que plein de gens cool en portent ».

Et les réponses ne sont pas faites attendre… La page FB a été prise d’assauts par des chaleureux messages d’encouragements accompagnées de photos d’internautes qui exhibent fièrement leurs montures en tous genres.

Malgré ce raz-de-marée à la rescousse de Noah, Lindsey souhaite continuer sa campagne jusqu'à ce que son fils ait complètement accepté son nouveau look.

À première vue, quoi de plus attendrissant qu’une maman voulant aider son enfant à passer un cap difficile ? Certes, l’opération qu’elle a lancée n’est pas très discrète mais après tout, pourquoi pas, si cela marche ?

Va-t-on assister au lancement d’une nouvelle campagne Facebook intitulée cette fois… « Une bonne note pour Noah » ?

Imaginons maintenant que dans quelques temps Lindsey nous annonce qu’après avoir franchi la barre des 100 000 « Like » son fils a enfin avoué se sentir bien dans sa peau avec ses lunettes. Quelle sera donc la prochaine étape ? Ce cher bambin entrera un jour en  C.P. et on peut raisonnablement penser qu’il lui arrivera de revenir de l’école avec une mauvaise note. Comme tout enfant, il ne va pas très bien vivre ce désaveu. Quelle sera la suite du programme ? Va-t-on assister au lancement d’une nouvelle campagne Facebook intitulée cette fois… « Une bonne note pour Noah » ?

Tout le monde s’accorde pour dire qu’un enfant qui traverse une phase difficile a besoin de soutien. Mais la véritable question est de savoir si l’approbation virtuelle de dizaines de milliers de gens va véritablement l’aider. Nul besoin d’être un fin psychologue pour comprendre qu’il aurait largement suffit à ce petit garçon quelques bonnes explications de la part de ses parents  - doublées d’une savante dose de patience - pour surmonter ce changement.

Le diktat des "J'aime"

Au-delà de ce débat, on constate que la réaction de Lindsey est symptomatique de la génération Facebook où le diktat des « J’aime » règne en maître. Tout le monde cherche l’approbation de tout le monde.

- Je tape sur mon compte FB un commentaire drôle. Ouah ! J’ai déjà eu 15 « J’aime ». Ça fait du bien !

- Tiens donc ! Trois demandes d’amis en deux heures ! J’ai la côte en ce moment. »

- Et ce type que je ne connais ni d’Adam ni d’Eve qui n’arrête pas de m’envoyer des messages. Il me drague ou quoi ? 

Tout se passe comme si nous ne pouvions faire le moindre geste sans qu’on nous « Like », comprenez qu’on nous approuve et qu’on nous apprécie.

Facebook n’est bien sûr que la projection de ce qui se passe réellement dans le monde réel. Nous vivons dans une société où l’opinion d’autrui compte beaucoup dans la façon dont nous menons notre vie. Pas question de dire quelque chose qui pourrait choquer ou contrarier l’autre, pas question de s’habiller de manière trop originale, que vont penser les copains de moi ? Pas question de choisir un métier ringard, on va croire que je ne vaux rien. Et pour finir… pas question d’être moi-même, on risque de me prendre pour un fou. Dur, dur d’échapper à la tyrannie du « politiquement correct » !

Sur les traces d'Abraham l'Hébreu

Malheureusement, ce danger de passer à côté du meilleur de nous-mêmes par crainte de la réaction d’autrui n’échappe pas à la sphère spirituelle.

Et à force de rechercher l’approbation des autres, on finit par devenir leur copie carbone.

Qui d’entre nous n’a pas voulu passer à l’étape supérieure dans sa relation avec Dieu mais a fait marche arrière avant même de commencer par peur du regard ou du jugement de son entourage ?

- Si me mets à manger cacher, me copains me traiteront de fanatique !

- Si je mets la kippa plus souvent, mes amis croiront que je cherche à me distancier d’eux.

La liste est longue…

Trop souvent, nous parvenons à surmonter nos combats intérieurs et à prendre les décisions qui renforceront notre identité et pratique juives. Mais au moment de les mettre en pratique, nous nous laissons rebuter par la crainte des réactions de notre entourage, par leur manque d’approbation face à la nouvelle voie que nous souhaiterions emprunter. Et à force de rechercher l’approbation des autres, on finit par devenir leur copie carbone.

Et c’est sans doute parce que le danger de l’asservissement au regard d’autrui est si présent dans nos vies que le tout premier alinéa du Choul’han Aroukh, le Code de la Loi Juive débute par cette puissante déclaration : « À l’heure de mettre en pratique un précepte de la Torah, l’homme ne devra pas se formaliser du regard des autres, même si ceux-ci en viennent à le ridiculiser ».

Car en définitive, mieux vaut essuyer la désapprobation de notre entourage que la douleur, ô combien frustrante, d’avoir renoncé à ce que l’on savait juste.

Celui qui veut réussir sa vie doit agir par conviction et par engagement personnel et non pas pour faire plaisir aux autres ou gagner leur approbation. Celui qui veut progresser doit avoir de l’audace, une audace sacrée.

L’exemple le plus édifiant est sans doute celui d’Abraham, que la Torah appelle « Abraham l’Hébreu ». Et le Midrach de commenter ce titre qui deviendra celui de tous les juifs : « Le mot Hébreu (Ivri) partage la même racine que le terme « rive » (ever). Pourquoi ? Car toute l’humanité se trouvait sur une rive, et Abraham se trouvait sur l’autre rive. »

Cette métaphore renferme l’essence de la révolution spirituelle opérée par Abraham : A l’époque où l’humanité entière sacrifiait aux rites polythéistes, le patriarche eut l’audace d’affirmer sa croyance en un Dieu unique. Aussitôt convaincu de la présence et de l’intervention divine, il choisit de vivre pleinement ses convictions quand bien même celles-ci se situaient aux antipodes des croyances environnantes. Et non seulement, il affirma ses positions, il devint lui-même une source d’influence positive pour les autres.

Alors avant de terminer ces lignes, nous souhaitons tous à Noah Fisher qu’il se sente très vite à l’aise avec ses nouvelles lunettes. Et surtout, qu’en grandissant il s’en serve pour voir des choses bien plus authentiques que son compteur de « J’aime »…

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