Monde Juif

L'essentiel de Pessah en 5 mots

16/03/2015 | par rabbin Benjamin Blech

Souvenir, Optimisme, Foi, Famille et Responsabilité – des concepts juifs au service de l'humanité !

Les grands penseurs se sont longtemps demandé pourquoi les juifs, qui représentent tout au plus 0,25 % de la population mondiale – ou comme le décrit si mémorablement Milton Himmelfarb (sociographe américain) : “La population juive à travers le monde est plus petite que l’erreur statistique inhérente au recensement chinois” – ont tellement influencé les domaines de l'entreprise humaine.

Comment expliquer que l’une des plus petites minorités au monde ait remporté le plus grand nombre de prix Nobel au 20ème siècle ? (Presque 1/5 de tous les lauréats sont juifs.)

Il est fort possible que tout ait commencé avec la naissance de notre peuple et la fête de Pessah que nous allons bientôt célébrer.

Pessah véhicule cinq concepts qui sont devenus de véritables formules sacrées pour mener une vie productive et réussie. Ce sont cinq concepts essentiels à connaître sur la fête et à intégrer dans notre vie quotidienne. Parce qu'ils animent l'âme du peuple juif depuis des milliers d'années, ces concepts nous ont valu le privilège d'accomplir, dans une large mesure, le rôle prophétique qui nous a été confié : “Être une lumière parmi les nations”.

Voilà en cinq mots les plus belles contributions que nous avons apportées à l'humanité : le souvenir, l'optimisme, la foi, la famille et la responsabilité envers autrui.

L’importance de la mémoire

Bouleversé par la façon dont le peuple juif a littéralement transformé le monde, l’écrivain américain Thomas Cahill a publié l’ouvrage “Les dons des juifs”, qui est devenu un bestseller international. D'après lui, le concept d'histoire est l’une des inventions juives les plus importantes.

“Souviens-toi que tu étais étranger dans le pays d’Égypte.” “Souviens-toi que Dieu t'a fait sortir de l’esclavage.” La mémoire est une injonction biblique qui n’a apparemment intéressé nul autre peuple que les juifs. Et c'est l'histoire de Pessah qui est à l’origine de ce devoir de mémoire.

Henry Ford est célèbre pour avoir dit que “L'histoire, c'est de la foutaise”, et la Ford Motor Company a également gagné en popularité pour avoir lancé la marque de voiture Edsel – deux gaffes probablement aussi stupides l'une que l'autre. L'histoire est notre seul moyen de tirer les leçons du passé. Elle nous permet de grandir “en grimpant sur les épaules des géants”, comme dit le dicton. Faites une erreur une fois, et vous êtes humain. Ne tirez jamais de leçon de vos erreurs passées, et vous êtes un sot. C'est pourquoi les célèbres paroles de George Santayana (écrivain et philosophe américain) valent la peine d'être écoutées : “Ceux qui ne tirent pas de leçon du passé sont condamnés à le revivre.”

La mémoire lie notre passé à notre futur. Elle transforme l'histoire en destinée.

Les hommes ont compris que vivre sans pouvoir se rappeler des évènements qui ont précédé est quelque chose d’horrible. Et il existe même un terme pour qualifier cet état : Alzheimer. Une maladie que nous redoutons peut-être plus que la mort car elle nous laisse comme des corps sans vie. Paradoxalement, nous n'avons pas de terme pour décrire l'ignorance de notre histoire collective. Connaître le passé a une valeur autant historique que personnelle. C’est en connaissant l’histoire de notre peuple que notre vie prend un sens.

En effet, la mémoire lie notre passé à notre futur. Elle transforme l'histoire en destinée. Apprendre à lui donner de la valeur fut la première étape qui nous a propulsés en tant que peuple au rang de l'excellence.

L'importance de l'optimisme

L'histoire de Pessah nous fait prendre conscience que la tâche la plus difficile que Moïse dut affronter ne fut pas de sortir les juifs d'Égypte, mais bien de sortir l'Égypte du juif. Ils étaient tellement habitués à vivre comme des esclaves qu'ils avaient perdu tout espoir de pouvoir changer leur destin.

Sans espoir, ils auraient pourtant été perdus.

Le véritable miracle de Pessah – et son impact à travers les générations – est le message puissant qu'avec l'aide de Dieu, aucune difficulté n'est insurmontable. Un tyran tel que Pharaon peut être détrôné. Une nation aussi puissante que l'Égypte peut être vaincue. Les esclaves peuvent devenir des hommes libres. Les opprimés peuvent briser les chaînes de la captivité. Tout est possible, si on ose seulement rêver de l'impossible.

Dans l'histoire de la création du Grand Sceau des États-Unis (America's Great Seal) en août 1776, Benjamin Franklin utilise une image allégorique particulièrement marquante. En effet, il choisit la scène dramatique de l'Exode, où le peuple est confronté à un tyran pour gagner sa liberté.

“Pharaon assis sur un char, une couronne sur la tête et une épée à la main, traversant les eaux divisées de la mer Rouge à la poursuite des Israélites : des rayons jaillissant d'une colonne de feu à travers les nuages, symboles de la présence et de l'ordre divins, se reflétaient sur Moïse, debout sur le rivage, les mains levées au dessus de la mer qui submergea Pharaon.”

Ces paroles qui trouvent leur origine dans l'histoire de Pessah ont exhorté George Washington et les pères fondateurs de la Constitution américaine à se rebeller contre l'oppresseur britannique avec pour devise : “La rébellion contre les tyrans est obéissance à Dieu.”

De même, la vision de Moïse menant son peuple en Terre promise a donné espoir aux disciples de Martin Luther King dans leur quête pour l'égalité des droits. Le souvenir de Dieu délivrant nos ancêtres a encouragé les juifs prisonniers à Auschwitz à célébrer secrètement la fête de la liberté et à croire en leur propre délivrance.

Cet esprit d'optimisme, basé sur les miracles de notre propre histoire, et définissant notre identité juive, est la deuxième grande contribution que nous avons apportée à l'humanité.

L'importance de la foi

On dit que le pessimiste est celui qui ne croit pas en une “aide invisible”.

L'optimiste juif, quant à lui, croit fermement en une aide qui vient “d'en-haut”, d'un Dieu attentionné. C’est cette foi en un Dieu bienveillant qui nous donne confiance en nous, en notre futur et en notre capacité à changer le monde.

Le Dieu du Sinaï n'a pas dit “Je suis l'Eternel ton Dieu qui a créé le ciel et la terre” mais “Je suis l'Eternel ton Dieu qui t'a fait sortir du pays d'Égypte, de la maison de servitude.” En théorie, le Dieu de la Création aurait pu délaisser ce monde une fois sa tâche accomplie. Mais le Dieu de l'Exode, Lui, nous a bien fait comprendre qu'Il est constamment impliqué dans notre histoire et qu'Il s'engage pour notre survie.

L'histoire de Pessah véhicule le message que l'histoire n'est pas le fruit du hasard. Elle suit un plan Divin.

Thomas Cahill attribue aux juifs non seulement le concept de monothéisme mais également l'idée révolutionnaire d'un être Divin avec Lequel nous partageons une relation privilégiée. Pour lui, c’est un principe fondamental de la civilisation occidentale en matière de responsabilité, conscience et culpabilité personnelles, pour soi et le reste du monde.

L'histoire de Pessah véhicule également le message que l'histoire n'est pas le fruit du hasard. Elle suit un plan Divin, un ordre prédestiné. “Ordre” en hébreu se dit “Seder” - et c'est pour cela que le rituel principal de Pessah répond à ce nom. Le hasard n'est pas un concept juif. Le hasard, c'est le biais par lequel Dieu a choisi de rester anonyme.

La foi en Dieu nous donne la certitude que malgré nos difficultés, l'histoire avance vers la délivrance finale. C'est ce qui nous a toujours poussés à croire au progrès et en la perfection du monde (tikkoun olam).

L'importance de la famille

Pessah nous enseigne une autre grande vérité : parfaire le monde commence chez soi, par sa propre famille.

Dieu a construit sa nation non pas en donnant l'ordre de rassembler des centaines de milliers de personnes sur une place publique mais en demandant aux juifs de transformer leur foyer en un lieu de culte familial, et ce autour d'un seder dont l'activité centrale est de répondre aux questions des enfants.

C'est l'évidence même ! Les enfants sont notre futur. Ils sont ceux qui ont le plus besoin de notre attention. Et le foyer est le premier endroit où ils se forgent une identité et des valeurs.

Plus que dans les synagogues, c'est dans nos foyers que nous plantons les graines de notre futur et assurons notre continuité. Il n'est donc pas étonnant que nos commentateurs nous font remarquer que la première lettre de la Torah est le beth, la lettre qui signifie “maison”. Ainsi, la Torah prend tout son sens une fois que l'on intègre l'importance primordiale de la famille. 

Le monde peut bien se gausser de la surprotection des parents juifs et de leur mode de vie centré sur les enfants, mais ce sont ces mêmes parents qui sont à l'origine des accomplissements extraordinaires de leur progéniture.

À la table du Séder, on encourage donc les enfants à être les “stars” de la soirée et leurs questions sont traitées avec respect. Voilà la première étape pour développer le génie juif.

L'importance de la responsabilité envers autrui

Une question importante se doit d'être posée alors que l'on célèbre notre délivrance divine de l'esclavage égyptien. Nous remercions Dieu de nous avoir délivrés, mais pourquoi Dieu a-t-il permis que nous devenions les victimes d'un tel mauvais traitement ?

Une réponse incroyable saute aux yeux dans de nombreux textes de la Torah. Parce que nous étions esclaves en Égypte, alors nous nous devons d’avoir de l’empathie pour les opprimés de chaque génération. Parce que nous étions esclaves en Égypte, alors nous devons nous sentir concernés par les droits des étrangers, des sans-abris et des pauvres. Parce que nous avons connu l'oppression, alors nous, plus que toute autre nation, devons comprendre la douleur des opprimés.

Notre rencontre tragique avec l’injustice égyptienne avait pour but, dans une large mesure, de nous préparer à servir de porte-parole pour les générations futures, afin que nous puissions nous identifier à toute personne victime de souffrance.

Le but de notre souffrance était de faire de nous un peuple qui s’engage à réparer les torts du monde et à devenir le partenaire officiel de Dieu, afin que ce monde mérite d'assister à la délivrance finale.

Nous commençons le Séder en invitant les pauvres qui ont faim à se joindre à nous et nous le terminons en ouvrant la porte pour qu’entre Eliyahou Hanavi, symbole de la rédemption. Accepter notre responsabilité envers les autres est la clé pour hâter l'arrivée de Mashiah.

Dès leur plus jeune âge, chaque enfant juif s’identifie à ces cinq concepts puissants qui sont au cœur de la fête et du message de Pessah. Et c’est précisément parce que le souvenir, l’optimisme, la foi, la famille et la responsabilité sont devenus les traits de caractère essentiels de notre peuple, que nous avons été capables d’accomplir toujours plus et de repousser les limites de l'impossible.

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