Ce Qu'en Dit Une Mère Juive

Le syndrome des mamours

12/08/2013 | par Emouna Braverman

Surprenant : une étude universitaire révèle que les couples qui manifestent le plus leur tendresse en public sont nettement plus exposés au risque de divorce.

Les gens qui prennent le mariage pour une romance de télé-novéla seront tentés de satisfaire leurs propres besoins avant ceux de leur partenaire, et sont plus nettement exposés au risque de divorce que le reste des couples. Ce sont les conclusions d'une étude menée en 2010 par la très sérieuse Université de Virginie, dans le cadre d’un projet national sur le mariage.

Ce qui me fait sourire c’est que ces résultats concordent parfaitement avec la théorie qu'a établie mon cher époux, et qu'il a intitulée "Le syndrome des mamours". Selon lui, les couples les plus démonstratifs de leur amour, y compris en public, et qui en général s'affublent de tout un tas de surnoms aussi affectueux que ridicules – vous en connaissez certainement – ces couples-là donc réussissent en général très peu leur vie conjugale.

Paradoxal, direz-vous ? Et bien pas tant que cela.

A mon humble avis, il existe plusieurs raisons pour expliquer ce taux élevé de divorce parmi ce type de couples.

L'une d'entre elles tient justement à ce souci d'affichage de l'affection que l'on se porte : cela confine à une véritable représentation théâtrale donnée en public. Cela n'a plus rien à voir avec les sentiments que l'on ressent pour l'autre ; en fait, ça nous ramène à notre propre petite personne, à notre propre image sociale. "Regardez ce joli couple", "Ils sont tellement amoureux…" Il n'est donc question que de démonstration, de "show" a l'américaine. On se rêve au cœur d'une scène romantique, dans un film à l'eau de rose ou une célébrissime série télé, et on perd pied avec la réalité. Dans une telle relation, ce qu’on aime n’est pas l’autre, mais plutôt l’idée ô combien glamour de filer l’amour parfait. Une chose est évidente, ces mamours ne prouvent en rien la stabilité et l'intensité de la relation conjugale. 

D'ailleurs, la plupart des personnes qui jouissent d'un lien véritablement solide, et qui parfois se laissent aller à des gestes affectueux en public, reconnaissent que la véritable expression de l'amour reste de l'ordre du domaine privé et intime. Ils n'entendent pas l'étioler en la jouant sur la place publique. Ils tiennent à préserver leur intimité, et ne tiennent pas à la mettre en pâture devant de parfaits inconnus, même s'ils en resteront bouche bée et seront complètement émerveillés. Cette mise en lumière volera un peu de leur lien si spécial, et il est trop précieux pour être ainsi exposé.

Troisièmement, le problème avec la romance à l'eau de rose et le syndrome des mamours est qu'ils nous font glisser vers le fantasme. Le scénario original d'une romance implique toujours un amour non récompensé, qui peut rester en suspens dans les nuages, mais qui n'existe pas réellement. Il n'a jamais été mis à l'épreuve des couches souillées, des factures impayées et des robinets qui fuient. Dans cette fiction idéale, nul besoin de préparer le dîner, de vérifier les devoirs ou de descendre la poubelle. La réalité ne peut absolument pas rivaliser.

Le véritable amour consiste à donner, pas à prendre.

Et pourtant, c'est bien la réalité, et pas la romance imaginaire, qui triomphe finalement. Et dans cette réalité, ce sont les gens qui savent mettre leurs propres besoins au second plan qui bâtissent les mariages les plus heureux. On peut certes être romantique, mais tout en reconnaissant que le véritable amour se construit par le don, et non par le fait d'attendre de l'Autre, de prendre de lui ce qui nous convient. Il faut prioriser les attentes de son conjoint sur les nôtres. On doit se préoccuper d'abord et avant tout de notre foyer, en laissant de côté le reste du monde : c'est toi et moi contre le monde entier, comme dans la chanson de Claude François.

Personne n'a besoin de voir l'affection que l'on se porte pour qu'elle nous soit prouvée. Nul autre que nous n'a besoin de partager notre expérience intime du don. En fait, une union vraiment sacrée ne laisse place à personne d'autre que nous deux, et ce n'est pas le fait d'être assis à une station de bus ou de se balader dans un centre commercial qui doit changer ce fait !

Conserver l'intimité d'une relation amoureuse aide aussi à la préserver. Plus elle est exposée aux regards, plus son intensité se fane. Nous devons précautionneusement la préserver de toute attente et interférence extérieures.

Il est temps de rapatrier les gestes affectueux dans l'intimité du foyer, où ils sont nés. Il est temps de remettre la romance sur l'étagère des films à l'eau de rose. Il est grand temps de se creuser un peu les méninges et le cœur pour construire une relation solide, basée sur des valeurs et des buts partagés, et un esprit positif. Et il est grand temps d’apprendre à se soucier davantage de notre comportement dans la sphère privée plutôt que du qu’en-dira-t-on.

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