Vie Juive

Le deuil dans le judaïsme

13/10/2013 | par Maurice Lamm

Grâce à un sage processus conçu de manière graduelle, le judaïsme permet à la personne en deuil de sortir du gouffre de désespoir où elle se trouve et de revenir à la normalité de la vie quotidienne.

Le judaïsme, qui est si familier avec l’âme humaine et qui connaît si bien les succès et les travers de l’homme, sa grandeur et sa faiblesse, a conçu dans sa grande sagesse un système instaurant des périodes de deuil s’échelonnant progressivement. Durant ce laps de temps, la personne en deuil a loisir d’exprimer son chagrin et de libérer, avec une régularité délibérée, les tensions internes causées par la perte qu’elle a subie.

La religion juive propose une méthode admirablement structurée pour aborder le deuil, répartie en cinq étapes.

1. Première étape : la Aninout

Elle se situe entre le décès et l’enterrement, alors que le désespoir est des plus intense. Durant cette période, non seulement les agréments de la vie sociale sont supprimés mais la personne endeuillée se voit également exempte des principaux commandements positifs religieux, afin de tenir compte du trouble dans lequel il se trouve.

2. Deuxième étape : le chagrin

Les trois premiers jours qui suivent les obsèques, sont réservés aux larmes et aux lamentations. Les personnes en deuil ne doivent pas répondre aux salutations et demeurent chez elles (sauf dans des cas spéciaux). C’est un moment où il est généralement quelque peu décourageant de leur rendre visite, car il est trop tôt pour les consoler quand les blessures sont si fraîches. Le proche du défunt ne sort pas et manifeste sa peine en portant un vêtement déchiré, en s’asseyant sur des sièges bas, en chaussant des pantoufles, en s’abstenant de se raser et de procéder à des soins de toilette et en récitant le Kaddich (voir ci-après).

3. Troisième étape : la Chiva

Cette étape recouvre les sept jours qui succèdent aux funérailles et inclut celle mentionnée précédemment. Pendant cette période, la personne en deuil sort de la phase d’intense chagrin et accède à un nouvel état d’esprit dans lequel elle est disposée à parler de la perte subie et à accepter le réconfort prodigué par ses amis et par ses voisins.

Désormais, les horizons de la personne endeuillée s’élargissent. Elle continue à observer les contraintes soulignées dans le paragraphe plus haut mais elle est capable de dialoguer avec les connaissances qui viennent chez elle lui faire part de leur sympathie en plein milieu de son affliction.

Une obligation sacrée incombe à tout Juif, quel que soit son degré de relation avec le défunt ou avec ses proches, de consoler les survivants – ceux-ci pouvant être le père, la mère, le conjoint, le fils, la fille (mariée ou non), le frère, la sœur (ou le demi-frère ou la demi-sœur) du disparu.

Pour le judaïsme, témoigner de la compassion envers autrui en venant lui présenter ses condoléances est une mitsva, qu’un certain nombre des plus grands érudits considèrent comme un commandement biblique. Chacun se doit d’imiter Dieu: tout comme Dieu réconforte les endeuillés, aussi l’homme doit agir pareillement.

Le but fondamental de la visite de condoléances pendant la Chiva est de soulager la personne en deuil de l’intolérable fardeau qu’est sa profonde solitude. Il n’y a pas d’autre moment où l’être humain a tant besoin de la chaleur de l’amitié.

Ce froid interne que la mort de son être cher a provoqué en lui commence maintenant à se dissiper. Il sort peu à peu de l’isolement par rapport au monde des hommes dans lequel il s’était confiné et du repli sur soi-même et commence à retourner vers la normalité.

4. Quatrième étape : les Chelochim

Ce sont les trente jours (y compris la Chiva) qui suivent les funérailles. Incitée à quitter la maison après la Chiva et à rejoindre peu à peu la société, la personne en deuil est bien consciente qu’il ne s’est pas écoulé assez de temps pour assumer des relations sociales pleines et normales.

Il lui est généralement interdit de se raser (pour un homme) et de se faire couper les cheveux, de se tailler les ongles, de prendre un bain pour le plaisir. Par contre se laver par hygiène est permis.

5. Cinquième étape : l’année de deuil

Les personnes qui ont perdu un père ou une mère observent le deuil pendant douze mois (débutant le jour de l’enterrement). Durant cette période, la vie reprend son cours normal et les occupations professionnelles redeviennent une fois de plus une affaire de routine. Néanmoins, la personne en deuil ressent en son for intérieur la blessure due à la rupture avec l’être cher qu’il a perdu.

Ce qui affecte le plus sa vie quotidienne est l’interdiction absolue de prendre part à des réceptions mondaines et à des festivités, qu’elles soient publiques ou privées. La participation à ce genre de réunions n’est tout simplement pas en accord avec l’état de dépression et de contrition dont souffre la personne en deuil.

Ce serait vraiment incohérent qu’elle danse joyeusement alors que la terre qui recouvre son père ou sa mère est encore fraîche.

C’est pourquoi les Sages ont décrété que, alors que le proche du disparu ne se séparera physiquement et complètement des activités normales de la société que durant une semaine, il évitera toutes les événements joyeux pendant douze mois s’il a perdu son père ou sa mère et pendant trente jours s’il s’agit d’un autre membre de sa famille. La joie, en terme de deuil, est associée dans une large mesure avec les événements sociaux qui se déroulent en public plutôt qu’avec des satisfactions personnelles.

A l’issue de cette période, la personne affligée n’est pas supposée continuer le deuil, à l’exception de brefs moments qui consistent à observer Yizkor ou Yahrzeit (voir ci-après). En fait, selon la tradition juive, il n’est pas bien qu’une personne porte le deuil plus longtemps qu’il n’est prescrit.

Le Kaddich

Le Kaddich est récité pendant chaque prière, matin, après-midi, soir, Chabbat et fêtes, les jours de jeûne et de réjouissance.

L’intervalle de temps pendant lequel la personne en deuil dit le Kaddich pour ses parents est, théoriquement, une année pleine. On considère que le défunt passe en jugement devant Dieu au cours de cette période. Par conséquent, dans certaines communautés il est d’usage de réciter le Kaddich pendant douze mois quels que soient les cas.

Néanmoins, puisqu’on estime que le jugement des impies dure une année entière, et on suppose que nos parents ne font pas partie de cette catégorie, la coutume dans la plupart des communautés est de ne réciter le Kaddich que pendant onze mois.

On ne peut le dire qu’en présence d’un quorum dûment constitué, un minyan, composé d’au moins dix hommes ayant passé l’âge de la Bar Mitsva. S’il n’y a que neuf adultes et un enfant mineur (de moins de treize ans), le quorum n’est pas atteint pour former un minyan.

Le Yizkor et le Yahrtseit (Hazkara)

Le Yizkor est une cérémonie commémorant tous les morts pendant un service religieux tenu en commun à la synagogue. Le Yahrtseit (anniversaire d’un an du décès) est un anniversaire commémoratif personnel; on peut le célébrer pour un membre de la famille ou un ami mais il est destiné tout d’abord à ses parents.

Le Yizkor fut institué afin que les Juifs rendent hommage à leurs aïeux et aient conscience de la nécessité de mener une vie juste et de poursuivre les buts fixés par la tradition. Le principe fondamental de la vie juive en forme la base; c’est celui même qui motive et anime la récitation du Kaddich.

Il s’appuie sur la croyance profonde que les vivants, grâce à des actes de piété et de bonté, peuvent racheter les fautes du défunt. Le fils est en mesure de procurer de la considération pour son père. Le “mérite des enfants” sera attribué à la valeur des parents.

Ce mérite est obtenu, essentiellement, en vivant à un niveau moral élevé, en étant à l’écoute des demandes de Dieu et compatissant aux besoins de ses semblables. Prier Dieu et pratiquer la charité en sont l’expression la plus formelle.

Le Yahrtseit est un jour spécial où l’on célèbre l’anniversaire du décès de ses parents. Bien que ce mot soit d’origine germanique, cette tradition est décrite dans le Talmud.

Cette commémoration religieuse y est mentionnée, non pas comme une ordonnance mais comme la description du sentiment de tristesse éprouvé par le proche du défunt. Pour lui, c’est l’occasion de se rappeler chaque année la tragédie qu’il a vécue et par conséquent, il se doit d’éviter de manger de la viande et de boire du vin, symboles de réjouissance et de joie, quintessences de la vie.

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