Société

Pourim : l'antidote contre l'antisémitisme

07/03/2017 | par Slovie Jungreis-Wolff

Alors que les incidents antisémites se multiplient à un rythme alarmant, le message de la fête de Pourim résonne avec une acuité toute particulière.

Alors que les incidents antisémites se multiplient à un rythme alarmant aux quatre coins du globe, le message de la fête de Pourim résonne avec une acuité toute particulière.

À l’époque du livre d’Esther, les Juifs faisaient face à une terrible menace d’annihilation. Le spectre de la haine délirante d’Aman planait au-dessus de notre peuple tel un noir nuage. Le roi Assuérus lui avait donné carte blanche pour faire des Juifs « comme bon lui semblait ». Des missives avaient été envoyées par les courriers dans toutes les provinces du roi avec l’autorisation de « détruire, tuer, anéantir tous les Juifs, jeunes et vieux, petits enfants et femmes… »

Dans des circonstances aussi lugubres, comment nos ancêtres purent-ils garder l’espoir ?

Ma mère, la Rabbanite Esther Jungreis de mémoire bénie, nous a décrit le jour fatidique où elle et sa famille furent déportées de leur maison située à Szeged, en Hongrie, quand elle n’était encore qu’une petite fille. En pleine nuit, les Nazis les tirèrent de son sommeil. Mes grands-parents n’eurent à peine que de brefs instants pour rassembler quelques effets personnels avant d’être jetés dehors. Les bergers allemands aboyaient bruyamment. On n’entendait que des cris et des hurlements. Terrifiée, ma mère se tint dans la rue en serrant de toutes ses forces sa poupée préférée, la seule et unique possession qu’elle avait pu emporter avec elle.

Les voisins, qui étaient sortis de chez eux, observaient la scène avec stupéfaction.

« Tu es une sale Juive. Là où tu vas, tu n’aurais pas besoin de jouets. »

Soudain, ma mère remarqua son amie, Marta, qui était la fille de la femme de ménage non-juive de la synagogue. Les deux fillettes avaient toujours joué ensemble. Marta se tenait près de son père. Elle s’approcha de ma mère et pendant un court instant, ma mère fut réconfortée à l’idée que sa petite amie avait au moins eu la gentillesse de lui dire adieu.

Mais elle se trompait lourdement. Car arrivée devant elle, Marta lui arracha violemment sa poupée.

Éclatant en sanglots, ma mère s’écria : « Rends-moi cette poupée ! Elle est à moi ! »

Et Marta de riposter : « Mon père m’a dit que je peux prendre ce que je veux chez vous. Vous n’avez rien le droit d’emporter avec vous. »

Père et fille jetèrent un regard moqueur en direction de ma mère. Puis le père de Marta lui dit en ricanant : « Tu es une sale Juive. Et il est temps que tu rendes à la dure réalité. Là où tu vas, tu n’aurais pas besoin de jouets. »

Il cracha par terre. Puis il ajouta : « Mais tu n’as pas de souci à te faire. Marta prendra soin de toutes affaires. »

Ma mère fut déportée à Bergen-Belsen. Et elle en est revenue.

Combien de fois le monde a-t-il été prêt à dire adieu aux Juifs ? Combien de fois nos ennemis ont-ils juré de nous jeter à la mer, de nous terroriser, de déligitimiser jusqu’à notre souffle et de détruire nos enfants ?

Le transport de ma mère s’arrêta à Linz. Les passagers furent chargés dans des wagons à bestiaux. On leur rasa la tête. Dans la confusion générale, ma mère se retrouva conduite dans une salle de douches. Plus tard, ils se rendirent compte qu’il s’agissait aussi d’une chambre à gaz. Ma mère croyait vivre ses derniers instants sur terre. Elle avait l’impression d’avoir perdu son humanité. Elle ne pouvait même plus se résoudre à lever les yeux vers sa mère si belle à qui on avait arraché toute sa grâce et sa dignité.

Dans cet instant d’obscurité suffocante, quelque chose d’incroyable se produisit.

Tandis qu’elle se déshabillait, ma mère mit machinalement la main dans sa poche. Elle y découvrit un petit bout de papier tout froissé. Elle le sortit et le déplia avec précaution. Il s’agissait d’une page d’un livre de prière contenant le Chéma Israël. Mon grand-père l’avait dissimulé dans la poche de sa fillette en guise de message d’espoir. Les paroles du Chéma remplirent le cœur de ma mère d’un espoir renouvelé. Le message que son père avait voulu lui transmettre était évident : quoi qu’il arrive, quelque soit le destin que la vie te réserve, saches que tu n’es jamais seule. Ma chère enfant, tu appartiens au peuple juif. Dieu veille sur toi ; ne perds jamais la foi.

Les paroles du Chéma remplirent le cœur de ma mère d’un espoir renouvelé. Quoi qu’il arrive, tu n’es jamais seule.

Il est des moments où nous nous sentons envahis par le désespoir. Il est des moments où nous cherchons désespérément à nous agripper à la main de Dieu. Il est des moments où nous sommes incapables de comprendre ce qui nous arrive. Nous avons l’impression que la présence de Dieu est cachée. Mais nous devons être convaincus que derrière toute cette confusion se cache un plan divin. Dieu nous guide dans les coulisses. Nous survivrons.

Tel est le message de Pourim.

Et c’est la reine Esther, en personne, qui nous le transmet à chaque génération.

La Torah fait allusion au personnage d’Esther à travers le verset « Et Moi, Dieu, je cacherai Ma face en ce jour – aster astir panaï » (Deut., 31, 18) À certaines époques, nous sentons que la face de Dieu est cachée. Dans le Livre d’Esther, le nom de Dieu n’apparait pas une seule fois. Nous ne distinguons pas toujours la main de Dieu dans notre vie et nous n’en sommes pas toujours conscients, mais nous devons à tout prix savoir que Sa présence nous guide à chaque instant de notre vie. C’est à nous de lever le voile qui dissimule Sa présence sur terre et de chercher la lumière qui se cache derrière les nuages.

Cette nuit terrible où ma mère fut tirée de son sommeil et déportée vers l’inconnu, Marta et son père pensaient en avoir définitivement fini avec les Juifs. De même, les Nazis n’auraient jamais pu s’imaginer que viendrait le jour où le peuple juif arpenterait de nouveau les rues de Jérusalem et inonderait les pierres du Mur occidental de leurs larmes.

Cette page du Chéma Israël ne soutint pas seulement ma mère, mais aussi une génération entière de Juifs. Nous ne pouvons pas nous permettre de renoncer à nous-mêmes.

Ne succombons jamais au désespoir. Faisons nôtres les conseils que la reine Esther adressa aux Juifs de Suse à l’heure de leur détresse : Rassemblez-vous ! Cessez donc de vous blesser les uns les autres ! Et unissez-vous par la prière ! C’est le moment de raffermir votre identité, d’être plus que jamais fiers d’être juifs !

Face à la recrudescence de l’antisémitisme dans le monde entier, la haine virulente du mouvement BDS et les menaces affrontées par notre terre, nous devons prendre un moment pour réfléchir à notre situation. Nous avons affronté de cruels ennemis par le passé. Nous avons subi les pogroms, l’inquisition, les croisades, la Shoah et d’innombrables attaques terroristes meurtrières. Mais nous sommes toujours là, et nous continuons à vivre et raconter notre histoire unique en son genre.

Nous sommes toujours là, et nous continuons à vivre et raconter notre histoire unique en son genre.

Ne perdons jamais espoir. Gardons à l’esprit les paroles de la reine Esther : « Va, rassemble tous les Juifs ! » (Esther, 4, 16). Unissons-nous ! Serrons-nous les coudes. Faisons preuve de gentillesse et de sensibilité envers les gens qui nous entourent. Avec un mot gentil ou un sourire bienveillant, nous pouvons améliorer la vie de notre prochain. Prions et défendons le peuple juif.

Ensemble, nous avons le pouvoir de transformer le chagrin en allégresse et l’obscurité en lumière.

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