Ticha Béav

Le secret de la survie du peuple juif

11/07/2013 | par Nachman Zakon

"Toute chose est mortelle sauf le Juif ; toutes les autres forces passent, mais il demeure. Quel est le secret de son immortalité ?" L’énigme qui tarauda Twain trouve sa réponse dans une étrange requête de Rabbi Yo’hanan ben Zakaï.

Depuis l’une des rues animées de la Vieille ville de Jérusalem, je contemple le Cardo situé en contrebas, un site partiellement restauré d’une ancienne route romaine, construite lorsque la Jérusalem juive était en ruines. Et je m’étonne : les conquérants romains et ce qu’il en reste ne sont rien de plus qu’un site touristique populaire, alors que les Juifs, vaincus et exilés, sont bien présents : un peuple vibrant, dynamique et en pleine croissance.

L’aptitude juive à survivre est étonnante. De si nombreuses tentatives de nous annihiler, tant de persécutions et de destructions - or, nous sommes toujours là. Quel est notre secret ?

J’ai trouvé plusieurs réponses dans le Talmud, à l’endroit qui décrit de manière si poignante les derniers jours de Jérusalem avant sa destruction par les Romains.

Le Talmud nous apprend que l’un des dirigeants juifs de l’époque, Rabbi Yo’hanan ben Zakai, était sorti clandestinement de la ville assiégée de Jérusalem. Sa mission : rencontrer le commandant des forces romaines, Vespasien, pour tenter de sauver le peuple juif.

Le Talmud [Guittin 56b] décrit les événements de l’époque.

Rabbi Yo’hanan salua le commandant : « Que la paix soit sur vous, ô Roi. »

Vespasien répondit : « Tu mérites la peine de mort, car je ne suis pas Roi. »

Quelques instants plus tard, un messager en provenance de Rome se présenta et annonça à Vespasien : « Lève-toi. L’empereur est mort, et le Sénat t’a nommé gouverneur. »

Vespasien, impressionné par la prédiction de rabbi Yo’hanan, lui annonça : « Demande-moi une faveur et je te l’accorderai. »

Rabbi Yo’hanan présente trois requêtes au tout nouvel empereur de Rome :

  1. Épargne la yéchiva et les sages de la ville de Yavné
  2. Épargne la famille de rabbi Gamliel [descendants du Roi David].
  3. Donne-moi des médecins pour guérir rabbi Tsadok [un homme saint qui jeûna et pria pendant quarante ans pour éviter la destruction du Temple].

A quoi riment ces requêtes ? Imaginez la scène. Les Juifs sont à la veille d’un désastre national et la demande de rabbi ben Zakai se résume uniquement à épargner une petite yéchiva, un rabbin âgé et malade et une famille de sang noble ?

On ne comprend vraiment pas où veut en venir Rabbi Yo’hanan.

D’un autre côté, on ne peut dénier le succès de sa démarche ; son plan réussit - le peuple juif survécut effectivement. Pourquoi ?

Rabbi Yo’hanan ben Zakai présenta une requête dans des domaines qui touchent à l’essence du peuple juif : la Torah, le désir d’avoir une relation avec le Tout-Puissant et de se lier à Lui, et la croyance inflexible du Juif en un avenir meilleur et pacifique.

Le pouvoir de la Torah

La Torah possède un pouvoir étonnant de régénération. Un petit groupe de Juifs qui étudie la Torah va se développer et s’accroître. Immanquablement, leurs idées vont se propager à travers la Diaspora, inspirant les Juifs à maintenir leur judaïté.

Nous avons été les témoins de ce phénomène étonnant à notre propre époque. En Union Soviétique, un petit groupe de Juifs engagés commença à étudier la Torah en dépit du danger. Au bout du compte, ce réseau clandestin de groupes d’étude se transforma en milliers de participants, qui occupèrent une place importante dans la résurgence du judaïsme russe.

En deux générations, les quelques réfugiés survivants assistèrent à une renaissance presque miraculeuse de l’étude de la Torah.

Avant la Shoah, quelques milliers de Juifs étudiaient dans toutes les yéchivot d’Europe. Hitler détruisit les yéchivot d’Europe, fit brûler les livres sacrés et tua leurs dirigeants spirituels, les rabbins. En deux générations, les quelques réfugiés survivants qui recommencèrent à zéro en Amérique et en Israël avec une poignée d’élèves, assistèrent à une renaissance presque miraculeuse de l’étude de la Torah. On dénombre actuellement plus d’élèves étudiant dans l’une des principales yéchivot de Jérusalem que dans toutes les yéchivot de l’avant-guerre en Europe !

De même, le mouvement d’enseignement aux baalé techouva (personnes qui reviennent au judaïsme) fut initié à la fin des années soixante par quelques individus qui souhaitaient enseigner la Torah à de jeunes juifs. Au début ils ne furent qu’une poignée d’étudiants et par la suite des milliers , et tout cela par le pouvoir merveilleux de la Torah.

Retour vers le futur

La seconde requête de Rabbi Yo’hanan consista à préserver la lignée davidique, la lignée dont devait descendre le Messie, le futur Roi du peuple d’Israël. Par cette requête, il exprimait la croyance et l’espoir qui a porté et motivé le peuple juif depuis des millénaires - un univers ou règne la paix n’est pas seulement possible, il est inéluctable.

Apprendre à créer un lien

Le Temple avait été le lieu de culte des Juifs pendant plus de 400 ans, le lieu où ils venaient prier et satisfaire leur désir de communier avec Dieu. Avec sa destruction, les survivants et les générations suivantes auraient besoin de nouvelles stratégies et de nouvelles techniques pour forger une relation avec Dieu.

Rabbi Tsadok, un saint homme qui avait passé de nombreuses années à prier, allait leur prodiguer un enseignement. C’était l’expert en la matière, un trésor national qu’il fallait soigner et remettre sur pied afin que les Juifs puissent apprendre à maintenir leur relation avec le Tout-Puissant, apprendre comment prier même après la destruction.

La prière fait partie intégrante de l’arsenal du Juif. Tout au long des siècles, les Juifs ont perduré, surmonté les obstacles et survécu dans leurs maisons de prière.

Par ses trois requêtes audacieuses, rabbi Yo’hanan nous enseignait le secret de la survie du peuple juif. Sans la Torah, le judaïsme ne survivrait pas. Sans un espoir à toute épreuve dans l’avenir du judaïsme, le peuple juif ne survivrait pas. Et sans la prière et sans un lien solide avec Dieu, les Juifs ne survivraient pas.

Ma belle-mère est une survivante de la Shoah. Lorsqu’elle prend la parole dans le cadre de fêtes familiales, elle évoque souvent ses expériences à Auschwitz. Bien que son discours varie, sa conclusion est toujours la même : Am Israël ‘hai, le peuple juif est immortel !

Ticha BéAv est la période pour se rappeler les tragédies qui ont frappé le peuple juif, mais - comme rabbi Yo’hanan l’avait vu avec tant de perspicacité - c’est aussi un moment pour se concentrer sur l’espoir, l’avenir et la renaissance.

Am Israël ‘hai !

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