Monde Juif

Vous avez dit « Plus jamais ça » ?

12/04/2015 | par Charles Krauthammer

Vous voulez sincèrement honorer les morts de la Shoah ? Exprimez donc votre solidarité avec les vivants – Israël et ses 6 millions de juifs.

Au milieu des expressions de regret rituelles et des promesses de « plus jamais ça » clamées lors du 70ème anniversaire de la libération d’Auschwitz, une ironie amère s’est imposée. L’antisémitisme est de retour en Europe. Avec une ardeur renouvelée.

Et il est devenu chose courante. Si le massacre du supermarché cacher de Paris ne s’était pas produit conjointement avec celui du Charlie Hebdo, combien d’attention internationale aurait-il suscité ? Aussi peu qu’en a suscité le meurtre d’un rabbin et de trois enfants dans une école juive de Toulouse. Aussi peu qu’en a suscité l’attentat terroriste qui a fait quatre morts au Musée juif de Bruxelles.

La montée de l’antisémitisme européen n’est, en réalité, qu’un retour à la normale. Pendant un millénaire, la haine virulente du juif – exprimée par persécutions, expulsions et massacres – était la norme en Europe jusqu’à ce que la honte de la Shoah produise une anomalie temporaire dans laquelle l’antisémitisme est devenu socialement inacceptable.

Mais la parenthèse s’est refermée. La haine du Juif est de retour, rattrapant le passé avec un zèle saisissant. Des Italiens protestant contre la guerre à Gaza ont distribué des dépliants appelant au boycott des commerçants juifs. Exactement comme dans les années 1930. Un comédien français largement populaire a lancé une variante du salut nazi. À Berlin, suite aux évènements de Gaza, des manifestants ont scandé : « Juif, Juif, porc lâche, sors dehors pour te battre ! » À Berlin, notez-le bien.

Cela dit, l’antisémitisme européen n’est pas un problème juif. C’est un problème européen, une tache, une maladie dont l’Europe est congénitalement incapable de guérir.

Du point de vue juif, l’antisémitisme européen est une question secondaire. Car l’histoire du judaïsme européen est terminée. Elle est morte à Auschwitz. La place de l’Europe comme centre et point d’appui du monde juif a été héritée par Israël. Israël n’est pas seulement le premier État juif indépendant en 2000 ans. C’est aussi, pour la première fois en 2000 ans, la plus grande communauté juive de la planète.

La menace qui pèse sur l’avenir juif ne se trouve pas en Europe mais dans le Moyen Orient musulman, qui est aujourd’hui l’épicentre de l’antisémitisme global, une véritable usine de littérature et films anti juifs, de propagande, d’appels à la violence et, disons-le, à un nouveau génocide.

La charte fondatrice du Hamas n’appelle pas seulement à l’éradication d’Israël mais aussi au meurtre des Juifs où qu’ils soient. Ainsi, le chef du Hezbollah Nassrallah encourage l’émigration des Juifs en Israël parce qu’elle facilite leur élimination : « Si tous les Juifs se rassemblent en Israël, cela nous évitera le désagrément de leur courir après dans le monde entier. » Et, bien entendu, l’Iran déclare ouvertement l’annihilation d’Israël comme sa mission sacrée.

Pour l’Amérique, l’Europe et les Arabes modérées, il existe de puissantes raisons – des raisons aucunement liées à Israël – d’empêcher le régime clérical anti-occident, fanatique et apocalyptique de Téhéran de se doter de l’arme atomique ; l’hégémonie iranienne, la prolifération nucléaire et la sécurité nationale élémentaire.

Pour Israël, toutefois, la menace est d’un tout autre ordre. Elle est directe, immédiate et mortelle.

Les esprits douillets nous prient de ne pas nous inquiéter. La dissuasion nucléaire marchera, arguent-ils. N’a-t-elle pas marché contre les Soviétiques ? Et bien, 17 ans seulement après le début de l’ère atomique, nous avons frôlé l’échec de la dissuasion nucléaire ainsi qu’une guerre nucléaire totale. De plus, les communistes irréligieux n’espèrent aucune récompense au paradis. En tant qu’athées, ils raisonnent autrement que ces djihadistes et leur culte de la mort. La preuve, citez-moi un seul kamikaze soviétique.

L’ex-président iranien Ali Akbar Hachemi Rafsanjani, connu comme un modéré, a une fois déclaré que vue sa petite superficie, Israël pourrait être détruit au moyen d’une seule arme nucléaire. S’il a reconnu la capacité de dissuasion d’Israël, il n’a pas manqué de remarquer l’asymétrie des forces : « L’emploi d’une seule arme nucléaire contre Israël ne laisserait subsister sur son sol, alors qu’il ne causerait que quelques dégâts au monde de l’Islam. » Résultat ? Israël rayé de la carte, et l’Islam vainqueur. Voilà qui en dit long sur le bien-fondé de la dissuasion.

Et même si la dissuasion marchait avec Téhéran, le problème ne serait pas réglé pour autant. Car le simple fait que l’Iran se dote de l’arme nucléaire lancerait une course à l’armement nucléaire parmi une demi-douzaine de pays musulmans, depuis la Turquie jusqu’à l’Égypte en passant pas les pays du Golfe, et ce, dans les zones les plus instables du monde. Des zones où à votre réveil vous trouvez un gouvernement pro-américain yéménite renversé par des rebelles et ayant pour leitmotiv : « Dieu est grand. Mort à l’Amérique. Mort à Israël. Maudits soient les Juifs. L’Islam au pouvoir. »

L’idée qu’une espèce de dissuasion hexagonale marcherait dans ce chaudron bouillant d’instabilité, comme cela a été le cas dans la bipolarité figée de la guerre froide, est tout bonnement ridicule.

Le nucléaire iranien est une question de sécurité nationale, une question d’alliance et une question régionale du Moyen Orient. Mais c’est aussi une question foncièrement juive étant donné qu’Israël est le seul État sur terre ouvertement menacé d’extinction, en buttes à un pouvoir nucléaire potentiel menaçant ouvertement cette extinction.

En ce 70ème anniversaire de la libération d’Auschwitz, pleurer les Juifs morts est facile et, pardonnez-moi, de mauvais goût. Voulez-vous véritablement honorer les morts ? Exprimez donc votre solidarité avec les vivants – Israël et ses 6 millions de juifs. Faites du slogan « plus jamais ça » plus qu’une promesse creuse. Il a fallu 6 ans à l’Allemagne nazie pour tuer 6 millions de juifs. Il suffirait à un Iran nucléaire d’un seul jour.

Cette tribune a paru dans le Washington Post

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