Tweet ignoble sur ‘Haya zatsal. Peut-on stopper l’antisémitisme ?
L’horreur en 108 caractères. L’indignation ne suffit pas face à l’antisémitisme d’un tweet d’une violence inouïe découvert ces derniers jours.
Révoltant, insupportable, douloureux, inacceptable. C’est ce que chacun d’entre nous ressent en découvrant l’abominable tweet publié par une ressortissante suisse il y a quelques jours. Elle commente la mort de ‘Haya Zissel zatsal, le bébé de trois mois assassiné par un terroriste il y a trois semaines à Jérusalem. Voici le texte, qui est si choquant qu’il est difficilement supportable :
« C’est bon de voir cette petite tête de p…., j’aurais aimé voir sa g…. quand elle est morte cette chienne ».
C’est ainsi que les réseaux sociaux ont une nouvelle fois découvert la face répugnante de l’antisémitisme.
Et c’est pour moi l’occasion de me reposer la question : pourquoi et comment ce genre de réactions peuvent-elles être provoquées par la mort d’un bébé si tendre, arraché si cruellement à la vie par la barbarie et la cruauté ?
Ce tweet a été rédigé par une jeune fille d’un pays civilisé, vivant dans une société occidentale, et non par un terroriste sanguinaire. Elle est étudiante à l’Université et son père est diplomate. Alors pourquoi ?
Il y a un aspect irrationnel à ce phénomène, c’est indéniable. Car qui peut se réjouir avec tant de violence de la fin tragique d’un être si vulnérable ?
La première réponse vient de nos Sages : lorsque la Thora fut donnée sur le Mont Sinaï, le texte nous dit : “Ne lis pas Sinaï mais Sina (la haine) : Au pied du Mont Sinaï, commença la Sina.”
La haine du Juif est bel et bien irrationnelle puisqu’elle a sa source dans un événement qui eut lieu il y a plusieurs millénaires. Or, malgré l’assimilation et l’abandon de la source même du phénomène (la Thora) l’antisémitisme persiste et signe (sur twitter). C’est en Allemagne où les Juifs avaient changé leurs noms Isaac et Deborah pour Franz et Ursula que naquit le nazisme. Pas en Pologne, en Russie ou au Maroc où les Juifs étaient majoritairement religieux. Ce n’est donc pas forcément le respect du chabbath et de la cacherouth qui provoquent la haine.
Rachi, le commentateur du Moyen Age, explique, en citant Rabbi Chimon bar Yo’haï : « Il est une loi bien connue, qu’Esaü déteste Yaakov ».
Cette haine qui dépasse le contexte personnel de la lutte que voulut mener Esaü contre son frère, est analysée par nos Sages comme une « loi », qui a donc un caractère immuable. Quel en est le sens ?
Une amie m’avait raconté sa techouva (son retour aux sources). Un jour, elle marchait à Paris dans le métro. Son cœur commença à battre plus fort lorsqu’elle lut sur un mur une inscription en noir, agrémentée d’une croix gammée : « Mort aux Juifs ». Elle qui n’était pas particulièrement engagée et qui vivait son identité juive très superficiellement, ressentit un électrochoc. Elle commença à s’intéresser à sa culture, à ses coutumes, pour finalement étudier sérieusement les textes et devenir pratiquante. L’inscription avait fait plus que n’importe quel discours de Rabbin.
L'antisémitisme a une fonction : il rappelle que les Juifs ont besoin d’un aiguillon pour rester séparés et distincts des nations. Cette haine peut parfois être atténuée et il est possible de rencontrer de grands philosémites (l’histoire en a connu des illustres, comme par exemple Marc Twain, Léon Tolstoï ou encore Dmitri Shostakovitch) mais lorsqu’elle nous percute en pleine figure, comme le tweet publié cette semaine, c’est qu’elle a son sens. Elle peut (et doit) avoir un effet positif : elle nous ramène, qui que l’on soit, pratiquant ou pas, à la nechama juive qui brille en chacun de nous et nous rappelle que notre allié ultime est D.ieu, vers qui nous devons nous tourner dans les moments d’obscurité et de tourment.
Les Sages enseignent qu’il faut, dans l’exil même, remercier D.ieu d’avoir créé la haine des Nations envers les Juifs. D’après la tradition, cette haine est un garde-fou contre l’assimilation. Rachi, dans son livre Pardès Hagadol, écrit :
« Le peuple d’Israël doit être extrêmement reconnaissant envers Son Créateur d’avoir créé parmi les Nations une haine et une jalousie envers lui. Sans cela, « nous nous serions mélangés aux peuples, apprenant à nous conduire comme eux », comme il est écrit dans les Psaumes (106-35). »