Le véritable amour
'Hayé Sarah (Béréshit 23:1-25:18 )
Il fascine, il est le thème de prédilection des poètes et des artistes. Mais qui est-il vraiment?
Trop souvent existe dans notre société une confusion des idées. Si nous n’approfondissons pas attentivement les textes de la Torah, on risque de faire nôtre des principes qui n’ont rien à voir avec l’éthique de la Bible. Les exemples sont malheureusement nombreux et nous imposent une vigilance de chaque instant. Un verset tout à fait anodin de notre Paracha vient donner un éclairage nouveau sur un thème que l’on retrouve abondement dans tous les médias. Il s’agit de la relation au sein du couple.
Après le départ de ce monde de sa mère, Its’hak épouse Rivka. À la fin du second chapitre de notre Paracha, le texte nous relate sommairement leur mariage en précisant que « Its’hak épousa sa conjointe puis l’aima ». L’agencement des mots a de quoi surprendre. En général on aime quelqu’un et c’est ce sentiment qui nous incite à nous marier. Et là, situation surprenante, c’est le mariage qui est la cause de l’amour ! Une explication à cette apparente anomalie s’impose.
La raison et le cœur
En Occident, l’amour est l’expression d’un sentiment. Rien de plus. Une personne amoureuse ressent un profond élan affectif qui parfois défie même la raison. Il est souvent vécu sur un mode pulsionnel qui construit précisément sa légitimité. Dès lors, quoi donc de plus beau que l’amour ?
Mais pour les Maîtres de la tradition juive, la définition de l’amour se situe aux antipodes de cette approche. Pour le comprendre, il faut rappeler un important principe développé longuement dans la Kabala. Les sentiments sont le produit de l’intellect. En d’autres termes, l’amour n’est pas qu’une impulsion, c’est aussi et avant tout une construction. Les Maîtres de la tradition ésotérique font d’ailleurs remarquer que si l’on se place au niveau de la morphologie, la tête est au-dessus du cœur. En effet, les cabalistes enseignent que la tête, l’intellect, doit tempérer les pulsions du cœur qui sont loin d’être réfléchies et sereines. Ainsi par exemple, un enfant se mettra en colère pour des choses insignifiantes alors que face à ces mêmes choses, un adulte n’éprouvera aucune passion. Il y a ici la preuve évidente que l’amour est un sentiment variable qui dépend de notre réflexion. Les sentiments et notamment l’amour, varient selon notre approche intellectuelle. Plus un être humain réfléchira, plus il éprouvera de l’attrait pour des choses réellement digne d’intérêt.
Une seule entité
À partir de ces données, on peut comprendre le sens de notre verset. « Amour » se dit en Hébreu « Ahava ». Or, ce mot a comme valeur numérique 13. Le mot « é’had » qui signifie « Un » a également la valeur numérique de 13. L’amour est l’aboutissement d’une construction affective et intellectuelle entre deux êtres qui, après de longues années, vont former une seule entité. Il est donc clair qu’avant le mariage, quand rien n’est encore véritablement construit, l’attirance que les futurs conjoints ressentent l’un envers l’autre n’est qu’un sentiment de bien être et d’affection. Ce n’est qu’après le mariage que l’amour véritable va se construire : la vie commune, la proximité des cœurs, le fait d’avoir des idéaux et des objectifs communs et de partager des difficultés ou des moments de bonheur.
Avant même le mariage, il est donc fondamental de mettre l’accent sur la valeur de l’étude et de la pratique de la Torah. C’est elle et elle seule qui peut construire véritablement notre identité, en nous aidant à avoir un nouveau regard sur l’existence. C’est alors que l’amour pourra prendre son élan authentique.