Le Compte du Omer

La Kabala, mais qu'est-ce au juste ?

23/05/2016 | par Yaïr Danielsohn

Oubliez le bracelet rouge… À l'approche de Lag Baomer, fête de la révélation du Zohar, découvrez la véritable définition de la Kabala.

Lag Baomer, le 33ème jour de la supputation du Omer, est un jour de fête commémorant le souvenir de Rabbi Chimon Bar Yo’haï. Grand sage de la Michna, Rabbi Chimon est davantage connu comme étant l’auteur de l’ouvrage fondamental de la Kabbala, le livre du Zohar (litt. : le livre de la Splendeur). Par conséquent, Lag Baomer en est venu à être associé à la Kabala, la tradition mystique qui traite des aspects ésotériques de la Torah.

Mais qu’est-ce, au juste, que la Kabala ? Et que peut-elle apporter au profane non-initié en termes de progrès spirituel et d’inspiration ?

Avant de répondre à ces questions, une mise au point s’impose : la Kabala n’est en aucun cas un « succédané » de judaïsme aux effets miracle, qui se résumerait à une carafe d’eau bénie, une amulette ou un bracelet rouge ayant le pouvoir d’attirer la bénédiction dans votre vie ou de résoudre tous vos problèmes…

Mais alors qu’est-ce donc que la Kabala ?

La Torah comporte deux niveaux principaux de compréhension. Le premier, appelé pchat, renvoie à l’explication simple, ne faisant guère appel à des concepts devant être déduits d’autres sources. Cela dit, ce terme est quelque peu trompeur, puisque même la signification élémentaire de la Torah nécessite une étude incessante et abrite une source intarissable de sagesse et d’inspiration.

Le second niveau est celui du sod, qui renvoie au secret. Dans cette dimension, chaque enseignement de la Torah peut être perçu comme la seule partie émergée de l’iceberg, laquelle fait allusion à des niveaux d’existence ésotériques avec lesquels nous n’entrons généralement pas en contact. En règle générale, ce niveau d’étude de la Torah met l’accent sur les manières dont Dieu interagit avec ce monde. Il décrit l’ADN spirituel de l’univers.

L’étude du sod porte également le nom de Kabala qui signifie littéralement « réception d’une tradition ». En effet, en raison de la nature extrêmement subtile de cette dimension de la Torah, celle-ci ne peut être correctement comprise qu’en étant transmise par un érudit versé en la matière. La discipline de la Kabala fut donnée au Sinaï, comme étant l’un des niveaux d’interprétation de la Torah. Elle a toujours été étudiée comme une partie intégrante de la Torah, et on y trouve de nombreuses allusions tout au long de la Michna et du Talmud, quoique son étude ait traditionnellement été réservée aux géants spirituels de chaque génération.

Tout comme on ne peut étudier la physique quantique sans posséder de solides bases en sciences, il est impossible de comprendre les secrets ésotériques du sod avant d’avoir au préalable étudié en profondeur le pchat, le niveau premier de la compréhension de la Torah.

Rabbi Chimon a exposé les concepts de la Kabala de manière systématique.

Parce que la Kabbala est l’étude approfondie de concepts extrêmement subtils, son étude a toujours été l’apanage d’individus dotés de qualités morales irréprochables, d’une intelligence supérieure, d’une solide maîtrise de tous les domaines de la Torah dévoilée, et d’un respect scrupuleux de ses commandements. De par sa nature sublime, elle ne peut être appréhendée par les esprits non raffinés.

Rabbi Chimon bar Yo’haï, considéré comme le père de la Kabala telle que nous la connaissons, n’a pourtant pas créé la Kabala ; celle-ci ayant été transmise sur le Mont Sinaï. Son rôle fut d’avoir exposé ses concepts et ses principes sous-jacents de manière systématique. En outre, il mérita une inspiration divine qui l’aida à comprendre certains concepts et à formuler de nouvelles idées. À ce jour, le livre du Zohar reste la source principale de sagesse kabbalistique.

Même après la révélation de la Kabala sous forme du Zohar, elle demeura une discipline cachée et énigmatique. Le Zohar est extrêmement concis et est principalement rédigé sous forme d’une espèce de code. À travers les âges, les plus grandes personnalités de la Torah ont fourni de considérables efforts pour expliquer et catégoriser les thèmes qu’il comporte. Le plus éminent de ces érudits fut Rabbi Its’hak Louria, connu sous son acrostiche Ari, qui s’établit à Safed, dans le nord d’Israël au 16ème siècle, ville où vivaient les plus célèbres cabalistes de son temps. À l’instar de Rabbi Chimon, le Ari ne se contenta pas de catégoriser les concepts kabbalistiques, mais entreprit également d’en révéler de nouveaux. Ses œuvres sont considérées comme l’interprétation du Zohar faisant autorité, devenant, à leur tour, le texte de la Kabbala de prédilection aujourd’hui.

Approfondir l’art de l’étude de la Torah

Ce qui soulève la question : quelle incidence la Kabala peut-elle bien avoir sur nos vies ? Eh bien, pour commencer, la simple prise de conscience que chaque mot de la Torah écrite, chaque commandement qui nous a été donné par Dieu, recèle une profondeur infinie devrait nous exhorter à renforcer notre engagement envers la Torah et ses commandements. En outre, cette prise de conscience peut encourager chacun d’entre nous à considérer la Torah comme une source intarissable d’inspiration, d’éducation et de sens, et nous inciter à approfondir notre propre exploration de la Torah. Quelque soit notre niveau d’étude, il y a encore tellement plus à découvrir !

Étudiée comme il se doit, la Torah a la capacité d’insuffler sens, but et profondeur dans nos vies.

Certains individus se rabattent sur la Kabala parce qu’ils perçoivent à tort les aspects non-ésotériques du Judaïsme comme étant dénués de sens et d’intérêt. Cette attitude est née de l’ignorance, parce que tous les aspects de la Torah, s’ils sont étudiés comme il se doit et sous la direction des bonnes personnes, ont la capacité d’insuffler sens, but et profondeur dans nos vies. Même les niveaux les plus élémentaires de la Torah abritent d’inestimables secrets, des secrets portant sur le fonctionnement des êtres humains, la façon dont ils peuvent améliorer leurs vies, et forger une relation épanouie avec leur Créateur. Ce n’est qu’après avoir maîtrisé à la perfection ce niveau de compréhension que l’on peut passer à l’étude du suivant ; celui de la Kabala.

Quelques exemples de pensées kabbalistiques

Cela étant dit, il est important de souligner que la Kabala présente également un intérêt direct pour nous. Bien que son étude approfondie soit préférablement réservée aux individus dotés des qualités préalables nécessaires, bon nombre de ses thèmes centraux sont devenus de véritables pierres angulaires de la pensée juive authentique classique. Voici quelques exemples :

L’une des contributions majeures de la Kabala à la compréhension de l’importance du respect des mitsvot et du service divin en général a été d’élargir la portée de l’activité humaine. Toutes les écoles de pensée de la Torah soulignent l’idée que chacune des actions de l’homme véhicule une signification et une responsabilité considérables en raison de l’impact qu’elle produit sur son être, non seulement dans ce monde-ci mais aussi dans le monde éternel. La Kabala a donc accru le sens de responsabilité de l’homme en soulignant l’effet « cosmique » produit par chacune de ses actions, affectant l’ensemble de la création à chacun de ses niveaux.

Dans les mots de Rabbi Moché ‘Haïm Luzzato, cabaliste du 18ème siècle : « Dieu a ordonné que… les actions de l’homme affectent les sources spirituelles de toute chose dans ce monde. Non seulement les actions de l’homme possèdent un tel effet, mais il en va de même pour ses paroles et pensées… » Ou comme l’écrit Rabbi ‘Haïm de Volozhin : « Un Juif ne doit jamais se dire : “Qui suis-je, et quelle différence font mes actions, de toute façon.” Au contraire, il doit savoir, comprendre et intégrer le fait qu’aucun détail de chacune de ses actions, paroles ou pensées n’est perdu. Ses pensées sont extrêmement puissantes et efficientes ; chacune d’entre elles s’élève vers les mondes supérieurs où elle a un impact précis. » Sous l’angle de la Kabala, chacun d’entre nous siège dans la tour de contrôle de l’univers, et chacun de nos mouvements a d’énormes répercussions.

Un autre enseignement capital de la Kabala concerne l’interdépendance des différents membres du peuple juif. Bien que l’unité soit une valeur juive élémentaire, cette idée a tendance à être assimilée à une simple métaphore. Mais la Kabala nous enseigne que nous sommes littéralement reliés au regard de nos âmes. Les âmes de l’ensemble du peuple juif émanant d’une unique source spirituelle, elles constituent donc différentes manifestations d’une seule et même entité spirituelle.

Ou pour reprendre les mots de Rabbi Moché Cordovéro, un contemporain du Ari qui fut enterré tout près de lui : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même, parce qu’il est réellement toi ! » Puisque dans notre essence, nous sommes littéralement un, aucune animosité n’a lieu d’être entre nous. (À un niveau encore plus profond, la Kabala enseigne que cette notion d’unité ne concerne pas seulement le peuple juif, mais s’étend également à l’ensemble des êtres humains, et même à tous les aspects de la création.)

Les feux de Lag Baomer symbolisent l’âme de la Torah.

Dans une même optique, le Ari a enseigné qu’avant chaque prière, il convient de méditer au commandement d’aimer son prochain comme soi-même. Ce faisant, l’individu atteint l’unité avec l’ensemble du peuple juif, et à travers cette démarche, ses prières n’émanent pas seulement de lui-même mais de l’ensemble du peuple juif, ce qui décuple leur puissance. Aujourd’hui, cet enseignement est gravé sur l’épitaphe du Ari dans l’ancien cimetière de Safed.

La Kabala et les feux de Lag Baomer

Pour les cabalistes, la Kabala constitue l’« âme de la Torah. » Pour un observateur, l’être humain peut se résumer à un amas de chair et d’os, alors qu’en réalité, son corps physique n’est qu’une enveloppe qui abrite ses émotions, son intellect et son composant spirituel, l’âme. Il en est de même pour la Torah. Même les aspects les plus profonds de la Torah qui nous sont donnés d’étudier, ceux du pchat, ne forment qu’un vernis extérieur en comparaison avec les dimensions profondes qu’elle recèle en elle.

L’âme de l’homme est comparée à une bougie car elle constitue la lumière qui guide son parcours spirituel. C’est la raison pour laquelle nous commémorons le souvenir d’êtres chers défunts en allumant des cierges. Les feux que beaucoup allument à Lag Baomer symbolisent l’âme de la Torah, révélée par l’intermédiaire de Rabbi Chimon, dont nous marquons le souvenir en ce jour.

Puissions-nous avoir le mérite de nous plonger, chaque jour davantage, dans les profondeurs de l’âme de la Torah, de nos propres âmes, et de celles des personnes qui nous entourent.

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