Odyssées Spirituelles

Le rabbin surfeur

21/09/2014 | par Shraga Simmons

Il s’appelle Yom Tov Glaser et a plus d’une corde à son arc : surfeur accompli, pro du VTT, guitariste virtuose. Ah, j’oubliais : c’est aussi un mentor spirituel qui ne compte plus ses fidèles ! Une rencontre qui décoiffe…

Il s’appelle Yom Tov Glaser et a plus d’une corde à son arc : surfeur accompli, pro du VTT, guitariste virtuose. Ah, j’oubliais : c’est aussi un mentor spirituel qui ne compte plus ses fidèles ! Rencontre.

À l’heure où l’éducation juive est en perte de vitesse, à l’heure où la nouvelle génération regimbe à lever le nez de son Smartphone pour s’intéresser aux choses de l’esprit, le rabbin Glaser parvient à « brancher » la jeunesse au judaïsme. Son secret ? Un cocktail détonnant d’auto-découverte, un jargon digne de la génération Z, et une étonnante facilité à troquer sa tenue de Hassid contre une combi de surf dernier-cri. Mais par-dessus tout, parce qu’il leur prouve que ce judaïsme qu’ils croyaient « out » est en réalité synonyme de bonheur et d’épanouissement personnel.

Au programme d’une soirée typique en sa compagnie ? Histoires vécues empruntes de sagesse juive, Kabbala et répertoire complet de Bob Marley. Et tandis que la foule se lève pour danser, Yom Tov zigzague à travers la piste sur son skateboard, guitare en bandoulière, dans une ode insolite à la portée positive du message juif.

Malgré un agenda criblé de rendez-vous, conférences et cours particuliers de rap, le rabbin Glaser nous a ménagé un petit entretien au centre Aish de Jérusalem. Rencontre.

Aish.fr : Parlez-nous un peu de votre parcours.

Yom Tov Glaser : J’ai grandi dans une banlieue huppée de Los Angeles, entouré de gens riches et célèbres. Mais ce côté bling-bling ne me disait rien. Depuis tout petit, j’étais à la recherche de la vérité, avec un V majuscule.

Je me rappelle qu’à l’âge de 11 ans, mon frangin Sam m’a conduit au sommet d’une colline pour observer le ciel étoilé. Sam qui s’y connaissait un peu en physique m’a parlé de l’étendue de l’univers et de l’insignifiance relative de la terre. Le soir, couché dans mon lit, je me suis fait la réflexion suivante : en gros, tu vis sur une petite poussière volante. Quel est ton rôle dans tout cela ? Au fil des années, ces questions n’ont fait que se renforcer.

Aish.fr : Vers qui vous êtes-vous tournés pour obtenir des réponses ?

Yom Tov Glaser : Je savais parfaitement que mes profs à l’école n’étaient pas intéressés par ce genre de questions. Je me suis donc tourné vers un rabbin de quartier et lui ai demandé : pourquoi Dieu a-t-il créé le monde ? Quel est notre but sur terre ?

Il m’a regardé comme si j’étais tombé de la lune. J’en ai donc conclu que le judaïsme n’avait aucune réponse à me fournir.

Aish.fr : Quelle a été l’étape suivante ?

Yom Tov Glaser : À 11 ans, j’ai fait l’école buissonnière et parcouru Los Angeles de long en large sur mon skateboard. Mes parents se sont montrés très patients et compréhensifs. Ils savaient qu’ils avaient affaire à un enfant bon et respectueux qui avait simplement besoin de s’aérer.

J’ai donc sillonné les rues en perpétuelle quête de sensations fortes. Entre le surf, le VTT et le skateboard, j’étais constamment à l’affût de ma prochaine poussée d’adrénaline. Le soir venu, je jouais de la guitare jusqu’aux petites heures de la nuit. C’était un moyen de détourner mon esprit du manque cruel de sens dans ma vie.

Aish.fr : Combien de temps a duré ce petit manège ?

Yom Tov Glaser : Jusqu’à l’âge de 18 ans, quand mon père m’a « soudoyé » pour que j’aille à la fac. La grande récompense était un tour du monde illimité, une offre que je ne pouvais pas décliner. C’est un miracle que j’ai été accepté à la fac vu mon parcours scolaire cahoteux.

Aish.fr : Comment s’est passée votre adaptation à l’université ?

Yom Tov Glaser : D’un côté, c’était difficile pour moi parce que je suis un homme de terrain. Mais j’avais pris la décision que puisque je me trouvais là, autant en profiter pour m’instruire au maximum. J’ai choisi des matières comme la philosophie de la science et l’histoire de la pensée. Au passage, j’ai également étudié la géologie et les effets du réchauffement planétaire sur les zones de surf.

Aish.fr : Quelles sont les idées qui vous ont influencé à l’université ?

Yom Tov Glaser : J’ai passé pas mal de temps à étudier le déconstructionnisme. Je vous épargne les détails, mais en gros, ce courant philosophique vous prouve que le sens de n’importe quelle œuvre que vous lisez ou admirez est en réalité arbitraire. Qu’importe ce que l’auteur ou l’artiste avait en tête, vous pouvez parfaitement en tirer vos propres conclusions. Nous nous exercions à lire des textes en imaginant une perspective totalement différente de celle de l’auteur, comme par exemple une lecture féministe de Frankenstein.

La leçon que j’ai retirée de tout cela est que l’univers ne possédait pas de sens inhérent. Pour moi qui étais à la recherche du sens de la vie depuis l’âge de 11 ans, ce fut là une révélation dévastatrice. J’étais totalement désorienté. Alors une fois mon diplôme en poche, j’ai entamé mon fameux tour du monde avec pour seul bagage ma guitare. J’ai passé beaucoup de temps en Europe, porté par un mantra d’amour, mais constamment en quête du sens de la vie. La seule chose qui me motivait c’était la découverte inopinée des côtes de France, d’Espagne et de Portugal qui abritent les meilleures zones de surf au monde.

Aish.fr : Comment avez-vous atterri en Israël ?

Yom Tov Glaser : Il s’est passé quelque chose d’incroyable. L’affaire de mon père a périclité et il n’avait plus de quoi financer mes expéditions. Alors mon frère Sam s’est débrouillé pour me faire venir au centre Aish de Jérusalem. Je me suis pointé à la Yéchiva avec ma tignasse bouclée, mon débardeur aérographe, mon grand pendentif en améthyste et ma guitare au dos. Je portais en moi 12 ans de questions. Et tout d’un coup, voilà qu’on m’offrait des réponses calées. Pour la première fois de ma vie, je rencontrais des gens qui comprenaient mes doutes, mon langage. J’étais tellement électrisé que j’en perdais le sommeil.

Aish.fr : Aujourd’hui vous partagez votre expérience et ces réponses que vous avez reçues avec d’autres. Avec votre barbe, vos longues papillotes et votre tenue hassidique, avez-vous parfois du mal à faire passer votre message ?

Yom Tov Glaser : Les gens sont persuadés que le judaïsme vous privera de tout ce qui vous procure du plaisir dans la vie. J’essaie, par mon propre exemple, de leur prouver le contraire. En me voyant, ils s’aperçoivent qu’on peut parfaitement mener une vie de juif pratiquant et prendre du bon temps. À condition bien sûr de respecter les règles du judaïsme.

Aish.fr : Vous êtes un grand fan de sports extrêmes. Comment l’accordez-vous avec votre judaïsme ?

Yom Tov Glaser : Tout le but du judaïsme est de se rapprocher de Dieu. En ville, chaque centimètre porte l’empreinte de l’homme, dans la nature, seule règne l’empreinte de Dieu. Maïmonide nous enseigne d’ailleurs qu’observer la beauté et la perfection de l’univers est un moyen privilégié de communier avec Dieu. Alors que je dévale les pentes des montagnes de Jérusalem, je m’accorde souvent des pauses pour parler à Dieu.

Aish.fr : Quel est le message principal que vous véhiculez à nos jeunes juifs ?

Yom Tov Glaser : Au fond d’eux, ils savent que ce monde-ci abrite des plaisirs bien plus riches, bien plus profonds que ceux après lesquels tout le monde court. Ils savent que le bonheur authentique ne s’obtient qu’en s’efforçant d’être une bonne personne, de faire les bons choix dans sa vie. Alors j’essaie de les faire renouer avec ces vérités qui leur sont innées.

Notre quotidien est jalonné d’une multitude de petits tests. Plus d’une fois, nous sommes tiraillés entre le devoir de faire ce qui est juste d’après notre logique, et le désir du plaisir immédiat. Quand nous faisons les mauvais choix, nous ne sommes pas bien dans notre peau. En revanche, quand nous faisons les bons choix, nous sommes envahis par une véritable sensation de bien-être.

Aish.fr : Alors qu’est-ce qui nous empêche de faire les bons choix ?

Yom Tov Glaser : Le fond du problème, c’est que la plupart des gens n’ont pas confiance en eux, en leur valeur, en leurs forces intérieures. Du coup, lorsqu’ils font face à un dilemme, ils n’ont pas le courage nécessaire pour suivre leurs bonnes intuitions. Et c’est ainsi qu’ils en arrivent à faire des choix qu’ils regrettent ensuite.

Aish.fr : Quelle est donc la solution ?

Yom Tov Glaser : Pour ma part, j’essaie d’encourager les jeunes à se forger une image personnelle positive. J’aimerais qu’ils apprennent à se détacher de ce besoin impérieux d’ « acceptation » qui gouverne généralement leurs prises de décision. Quand vous parvenez à vous libérer du joug de l’approbation des autres, alors vous devenez capable d’opérer des choix de vie en toute indépendance. C’est là que vous devenez vous-même. Et c’est là que votre vie commence véritablement.

« Venez secouer vos idées reçues sur le judaïsme au centre Aish Hatorah de Jérusalem. »

Yom Tov Glaser

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