Société

Du jour le plus saint au lieu le plus saint

02/12/2014 | par Joël Mergui

Avec l’attentat d’Har Nof, qui vise en Israël des juifs en leur qualité de Juifs, la preuve est faite que l’antisionisme est un antisémitisme.

Revêtus de leur châle de prière, quatre hommes sont tombés sous les coups de couteaux et de haches de leurs agresseurs islamistes venus frapper en pleine synagogue, à Jérusalem. Au nombre des victimes, un jeune homme des forces de l’ordre accouru les secourir et sept blessés. La courte histoire d'Israël est jalonnée d'attentats, de guerres pour sa survie, de conflits pour défendre sa population. Quelques jours auparavant des soldats avaient été poignardés dans la rue et un bébé de quelques semaines tué dans une attaque à la voiture bélier. Alors que la culture juive célèbre partout la vie et la création, ceux qui célèbrent avec des "youyous" de victoire ces meurtres barbares, cultivent avec passion la terreur et la mort.

A Toulouse, lorsque trois petits enfants juifs et un père sont exécutés froidement dans une école, Arié, Gabriel, Jonathan et Myriam sont- pour le meurtrier - coupables des soi-disant massacres commis par les Israéliens. La fin justifiant les moyens, pour les islamistes fanatiques, tous les juifs sont tenus pour acteurs et responsables du conflit au Moyen-Orient, même s’ils vivent en Europe, même s’ils ne sont pas israéliens et quels que soient leur âge ou leur nationalité. Dans cette logique terroriste, tuer des juifs en Europe, ou des soldats en Israël est un acte militant. Un geste qui serait non pas antisémite, selon eux, mais antisioniste, autrement dit politique et inscrit dans la lignée des luttes de résistance nationale à l’oppression. Grâce à sa rhétorique empruntée aux mouvements anticolonialistes des années 70, la « cause palestinienne » bien que largement djihadisée aujourd’hui s’attire toujours la sympathie irréfléchie des mouvements de gauche et d’extrême- gauche européennes pourtant radicalement laïcs.

Or, ce dernier attentat montre combien est lourd de sens et très symbolique le choix du lieu et des victimes. Choisir en toute connaissance de cause d’attaquer non pas des soldats ou des civils au hasard mais des hommes absorbés dans la prière dans une synagogue, c’est vouloir frapper plus que des Israéliens, plus que l’État d’Israël. C’est s’assurer d’atteindre leur essence même, ce qui en constitue l’identité la plus intime et concrète à la fois, le fait d’être Juifs. Car ce qui gêne les négateurs et les contempteurs d'Israël, ce ne sont pas les frontières, les négociations, le partage pour l’instant impossible en deux États, ou la politique, c'est le caractère juif d'Israël, son existence et sa présence en tant que berceau et terre des Juifs.

Avec ce dernier attentat, qui vise en Israël des juifs en leur qualité de Juifs, la preuve est faite que l’antisionisme est un antisémitisme voilé et qu’Israël est honni et combattu pour être ce qu’on lui refuse le droit d’être : juif.

N’oublions pas l’histoire : expulser ou éliminer les Juifs en Europe aux temps des ghettos ou en terre sainte, tel est le projet des individus, des systèmes de pensée ou des politiques antisémites. Si le 24 octobre 1973 Israël est attaqué massivement, c’est que la date choisie par ses ennemis ne doit rien au hasard. La « Guerre de Kippour, » le jour le plus saint du calendrier juif relève de la même logique implicite que celle qui a animée les auteurs du carnage dans une synagogue. Dans leurs actes de terreur les antisionistes reconnaissent implicitement ce qu’ils dénient à l’État d’Israël : d’être juif, terre des Juifs ! Triste ironie des faits qui distingue véritablement l’antisémitisme du racisme : hors d’Israël les juifs sont considérés comme des étrangers dont on veut se débarrasser pour qu’ils rentrent chez eux, tandis qu’en Israël, sur leur terre, tous les antisémites leur dénient le droit d’être chez eux ! Est-il d’autre peuple condamné par les nations et les hommes à devoir errer toujours ?

Il y a peu j’étais à Washington pour prendre la parole à l’invitation du Congrès juif d’Israël et de la Fédération des communautés juives d’Amérique du Nord et j’ai pu m’entretenir à nouveau avec M. Ira Forman qui occupe, depuis 2013, un poste unique au monde que j’appelle de mes vœux en France et au niveau européen : « Envoyé spécial du Département d’État pour la lutte contre l’antisémitisme. » Sa nomination est plus qu’une reconnaissance au plus haut niveau d’un État qui ne connaît pourtant pas d’acte terroriste antisémite sur son sol. C’est la conscience éclairée d’un phénomène contre l’humanité à l’œuvre dans nos sociétés qui doit être reconnu dans sa spécificité - quelle que soit sa forme -, pour pouvoir être mieux combattu. De fait, l’enjeu est de taille car il ne touche pas seulement les juifs, qui ne sont que les cibles d’avant-garde de la haine djihadiste, dont la soif d’hégémonie et de pouvoir vise en réalité l’éradication de tous les cultes et de toutes les sociétés qui ne relèvent pas de leur fanatique obédience.

Du jour le plus saint au lieu le plus saint, attaquer des juifs ou l’État d’Israël, les actes terroristes sont tous antisémites en dépit de leur masque antisioniste. La reconnaissance unilatérale même symbolique d’un État - dont les bases actuelles sont fondées sur la violence, la haine des juifs et l’anéantissement d’Israël - reviendrait à légitimer dangereusement, pour tous, l’antisémitisme contraire à l’humanité autant qu’à l’humanisme de nos principes démocratiques. Quelle démocratie peut accepter le risque que ses décisions soient instrumentalisées par ceux qui professent le meurtre, la discrimination et la terreur pour encourager indirectement le djihadisme dans sa guerre totale contre les nations, les peuples et les religions ?

(Extrait d'Information Juive - Novembre 2014)

Paru sur le site du Consistoire de Paris

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